L’invasion des nouvelles plateformes sociales

Saviez-vous que Facebook était valorisé à près de 15 milliards de $ ? Et saviez-vous que certain estime la valorisation de Second Life à près d’1 milliard de $ ? Oui bien sûr que vous le saviez puisque l’on en parle partout dans la blogosphère et même à la TV.

Par contre saviez-vous ça :

  • Il y a plus d’utilisateurs de Habbo que de Facebook ;
  • Il y a plus de vidéos hébergées sur CyWorld que sur YouTube ;
  • Neopets totalise près de 500 milliards de pages vues depuis sa création.

Et oui, ces chiffres sont surprenants et pourtant ils sont véridiques. En fait ils illustrent parfaitement la montée en puissance (silencieuse) d’une nouvelle génération de plateformes sociales qui sont à mi-chemin entre réseau social, service de partage et univers virtuel. Ce phénomène qui nous vient de Scandinavie et d’Asie reste pour l’instant assez obscur. Pour en savoir plus je vous recommande les études du cabinet +8* sur CyWorld et prochainement sur QQ.

Pourquoi de nouvelles plateformes sociales ?

Pourquoi un tel phénomène ? Tout simplement parce que les réseaux sociaux “traditionnels” n’apportent finalement pas grand chose par rapport aux réseaux de première génération (qui se souvient de Six Degrees ?). Les Facebook Platform et autres OpenSocial ouvrent de nombreuses possibilités mais se contentent de recycler le trio profil / liste d’amis / groupes.

C’est dans ce contexte que s’insèrent ces nouvelles plateformes sociales hybrides qui savent exploiter le meilleur de quatre secteurs à forte croissance :

  • Contenus générés par les utilisateurs (publication de photos, vidéos et pages persos) ;
  • Réseaux sociaux (qui sont au centre de toutes les attentions) ;
  • Univers virtuels (avec leurs avatars, monnaie virtuelles et lieux de socialisation) ;
  • Jeux en ligne (les fameux casual games associés à des quêtes, guildes…).

Sur ce modèle là, les leaders sont des plateformes comme CyWorld (40 millions d’utilisateurs), Habbo (80 millions d’utilisateurs) ou Neopets (165 millions d’utilisateurs) :

CyworldHabboNeopets.jpg

Le plus surprenant dans cette histoire c’est que ce succès ne date pas d’hier car en Décembre 2003 Neopets avait déjà la plus grosse part d’audience aux États-Unis : Neopets.com Fulfills Promise of Immersive Advertising (en bas de page).

Et ce n’est qu’un début puisqu’il existe quantité d’autres plateformes sociales de ce type dont les plus prometteuses sont Gaia Online, Playdo ou encore FakeTown :

GaiaPlaydoFaketown.jpg

Une cible encore et toujours jeune

Comme vous l’aurez compris, les jeunes sont la cible privilégiée de ces nouvelles plateformes sociales. Pourquoi les jeunes ? Pour plusieurs raisons :

  • Les jeunes sont constamment en quête de nouveautés (c’est la hype attitude) ;
  • Ils ont une faculté d’apprentissage beaucoup plus importante (utile quand on change de plateforme tout les 6 mois) ;
  • Ils ont un budget loisir confortable (de l’argent de poche qu’ils n’ont pas à gagner) ;
  • La sociabilisation au sein de ces plateformes est assurée par les jeux (les fameux casual games)

Sur ce dernier point je vous engage à lire cet article très instructif : Casual Games Worth $2.25B — But Where Are They Going?.

Au vue des montants évoqués, vous vous doutez que ces plateformes sont tout à fait pérennes, et ceci pour plusieurs autres raisons :

  • Elles bénéficient d’un effet réseau très fort (avec des utilisateurs qui se comptent en dizaines de millions) ;
  • Elles ont une très bonne trésorerie (notamment grâce au micro-commerce) ;
  • Elles sont adossées à des maisons-mères solides (Korea Telecom, Vicaom…) ;
  • Elles ont une très forte capacité d’évolution (à l’image de Playdo ou Gaia Online qui se sont métamorphosés en quelques mois).

Deux approches bien distinctes pour les annonceurs

Ne vous y trompez pas, même si ces plateformes vous semblent beaucoup plus abouties que d’autres univers virtuels (comme Second Life par exemple), elles ne remplissent pas les mêmes objectifs pour un annonceur : d’un côté vous avez des plateformes très matures qui proposent une offre structurante pour les annonceurs (ciblage, package standardisés, ROI pré-calculé…) ; de l’autre vous avez des univers 3D beaucoup plus sophistiqués… mais complexes où tout reste à faire.

Et c’est bien là où se fait la différence : ces nouvelles plateformes sociales sont parfaites pour une opération ciblée avec un ROI à court terme, par contre elles ne permettent pas à un annonceur de se positionner sur un média 3D réellement novateur. Comprenez par là que malgré tout les reproches que l’on peut lui faire, Second Life reste l’univers virtuel au sein duquel une marque à la plus de choses à apprendre sur un média en 3 dimensions.

Traduction : vous ne ferez pas la même chose dans Habbo que dans Second Life et surtout vous n’y trouverez pas le même type de relation avec vos cibles potentielles. N’oubliez pas que dans Second Life est un univers dont la croissance et le développement ne reposent que sur les résidents, c’est à dire vos prospects et clients. A partir de là, comment engager une relation mutuellement profitable dans un univers à 3 dimension ? Vaste question à laquelle vous ne trouverez de réponse qu’au travers d’expérimentations. Expérimentations qui sont très largement bridées dans des univers plus “cadrés” comme Habbo ou Gaia.

Qui pourrait bouleverser la donne ?

Y aurait-il encore de la place pour un autre acteur ? Mais oui bien sûr, mais pas ceux auxquels vous pensez immédiatement (Google, Microsoft, IBM…).

En fait Yahoo! est très certainement l’acteur le mieux positionné pour attaquer ce marché, et voici pourquoi :

  • Ils peuvent exploiter une des plus grosses audiences au monde ;
  • Ils disposent de nombreux services isolés qui pourraient former un tout cohérent (Messenger, Avatars, Kids, Games, Video, FlickR, Music, Groups, Sports, Mash, Kickstart…) ;
  • Ils ont déjà une infrastructure très robuste (équipes commerciales et techniques, data centers, régie publicitaire…) ;
  • Ils bénéficient du soutien de nombreux partenaires (fournisseurs de contenus…).

Bref, je crois très fort que Yahoo! pourrait faire un retour en force sur le devant de la scène, et vous ?

26 commentaires sur “L’invasion des nouvelles plateformes sociales

  1. Plus de vidéos sur CyWorld que YouTube ? C’est fou.
    Good call pour Yahoo en effet, si ils pouvaient fusionner leurs services ou participation dans des services autour d’un univers homogène, ils auraient une plateforme assez énorme.

  2. Hop,

    Très intéressant l’article, mais je me pose la question si Google, avec l’OpenSocial, ne va pas englober tout cela ?

    Il est très probable que prochainement on couple notre avatar SecondLife avec une page sur MySpace et autre. De plus, on pourra mettre à jour son profil et infos depuis SecondLife ou inversement, car pour l’instant la problématique de certains mondes virtuels se sont les logiciels clients qu’il faut installer ?

    A+

  3. Mon sujet de mémoire de Master portait sur les portails verticaux, c’est à dire communautaire. Nous nous étions rencontré Frédéric avant que je commence vraiment mes recherches. Voici le résultat: http://nicolas.cynober.fr/blog/?p=9.
    Le tableau que j’affiche provient de mon étude technologique des différents portails mais ne résume pas du tout l’ensemble de mes recherches (il faudrait lire tout le mémoire ;). Dans tous les cas ce qui est sûre c’est que l’avenir est dans le vertical, c’est à dire des SNSs spécialisés. “The mass market is turning into a mass of niches”.

  4. Binh, de mon coté, y’a quasiment rien qui – transpire – de chez Yahoo! concernant un environnement virtuel.

    Concernant Yahoo! Avatar Town, c’est juste un système “statique” pour choisir les vetements de ses personnages… Aucune mise en relation entre les utilisateurs.

    Toutefois, le système d’avatar de Yahoo! est un joli bijou (en Flash), et çà pourrait servir de base de travail pour un univers virtuel en pseudo 3D (via Flash dans le navigateur) comme Gaia Online… D’ailleur, çà serait plus accessible que le “bazar” à installer de Second-Life ou Entropia Universe qui imposent de les utiliser en exclusivité*.
    (*) comprendre que çà squatte notre PC (à l’écran et en ressources) à un point qu’on peut pas faire autrechose en même temps.

  5. Merci pour ce remarquable tour d’horizon du secteur. Peut-être serat-il bientôt possible d’établir des règles de pertinence d’un réseau social, voire un modèle d’évolution du secteur.

    En attendant, voici des éléments de réflexion sur la concurrence entre réseaux sociaux ( http://cratyle.net/2007/10/24/guerre-des-medias-sociaux-20-le-vainqueur-est%e2%80%a6/ ) et sur les relations entre ces réseaux sociaux, Opensocial et leur pendant ouvert, c’est à dire simplement la blogosphère ( http://cratyle.net/2007/11/06/vers-un-internet-reunifie/ )

    Cratyle

  6. Salut Fred,

    Ton point de vue se tient, mais je ne le partage pas tout à fait.

    Habbo, Second Life ou Gaia sont avant tous des univers virtuels inspirés du jeu vidéo. Ce sont des environnements à vocation ludique qui sont à mon sens générationnels et par leur nature même verticaux.
    La surcouche apportée par le monde virtuel vs le réseau social (à la FB ou MySpace) est aujourd’hui nettement marginale (en tout cas dans la culture occidentale à mon avis vs l’Asie).
    SL est à mon sens une belle expérimentation mais sans commune mesure avec l’invasion généralisée d’un MySpace ou d’un Facebook (le réseau France compte déjà + de 400k personnes). SL laisse présager des choses intéressantes que PlayStation est d’ailleurs en train de dépasser avec Home (dont j’ai eu la chance de voir et manipuler en beta).
    Enfin concernant les chiffres avancés par Cyworld, ils ont peut-être beaucoup de vidéos, mais je pense que l’audience n’est pas comparable avec YouTube. Ou alors, sa portée est très géolocalisée (?). Si tu as des infos là-dessus, ça m’intéresse.

    La fin 2007, début 2008 va surtout marquer les esprits par la capacité ou non de Facebook ou OpenSocial à s’imposer comme le mashup ultime, le haut de la pyramide identitaire digitale en somme.

  7. Merci Branislav pour ton long commentaire mais j’aimerais à mon tour modérer tes propos :
    – 400.000 utilisateurs de Facebook en France ? OK mais ça reste marginal au vue des presque 5 M d’utilisateurs de Habbo
    – PlayStation Home n’a pas pour ambition de dépasser Second Life, mais plutôt de proposer une alternative (plus qualitative mais surtout beaucoup plus restreinte dans la mesure où Sony contrôle tout ce qui va s’y passer).
    – Je ne vois pas comment Facebook pourrait s’imposer comme outils de mashup social dans la mesure où tout se passe sur sa plateforme. Jusqu’à preuve du contraire il n’existe qu’une seule initiative de mashup social (semi-)ouverte c’est OpenSocial, mais comme nous n’en avons pas encore vue la couleur, ça reste très hypothétique.

    /Fred

  8. C’est en effet très intéréssant ce que tu m’apprends là !! Je ne connais pas Habbo, je vais allez voir ceci !

  9. A la suite de ta réponse, trois précisions :
    1/ Si les 5 millions dont ils parlent est un chiffre annoncé par Habbo, je me méfie.
    Ces mondes virtuels sont des habitués du chiffre trafiqué. Combien de comptes parmi ces 5 millions sont abandonnés depuis longtemps. Peux-tu citer ta source sur ce chiffre. Et puis 5M pas seulement en France j’imagine…

    2/ Tu as raison sur le côté restreint et contrôlé. Je voulais simplement dire que Home est incroyable par sa capacité à concilier monde virtuel et petits jeux « casual gaming » véritablement fun à jouer en groupe.
    J’ai fait une partie de bowling et de billard dans le lobby de Home, c’est assez bluffant.
    Loin de tout ce que j’ai pu voir dans Second Life, qui à mon sens est surtout intéressant pour ceux qui « créent », restreignant ainsi cela aux seuls gens pour qui écrire quelques lignes de codes n’est pas un problème.

    3/ Un mash-up doit-il par définition être ouvert ? Un mash-up doit-il nécessairement pouvoir vivre n’importe où ? Oui, sans doute même si je serais bien incapable de l’expliquer à un profane de manière simple et évidente. Qu’est ce qui pousserait celles et ceux qui utilisent Facebook aujourd’hui en social networking, en tant qu’album photo/video ou bien encore messagerie à passer à une autre plateforme.
    Les réseaux verticaux ne sont que des sous-réseaux.
    Si je suis plombier à Paris, pourquoi devrais-je m’inscrire plus spécifiquement au réseau vertical des plombiers d’Ile de France me coupant ainsi des autres plombiers et de tout le reste de mon entourage.
    Si un réseau vertical des plombiers d’Ile de France apparaît, il faudrait qu’il soit relié à la tête de pyramide dont je parlais, soit donc à Facebook ou OpenSocial.

  10. @Branislav à propos de “Si un réseau vertical (…) apparaît, il faudrait qu’il soit relié à (…) Facebook ou OpenSocial.” :

    Ou qu’il soit complémentement “ouvert” pour se relier à tout ce qui se présente sur le Web, et selon les choix de l’utilisateur… Ouaip, pourquoi se contenter uniquement des 2 boulets que tu as cité ?!

    Imagine des réseaux verticaux avec leurs carosseries et accessoires spécifiques qui auraient le même chassis en commun… sous forme d’un unique supra-réseau-social “ouvert” et à la disposition des utilisateurs :o” .oO(un BigBrother en puissance)

    NB: l’allusion automobile n’est pas anodine, c’est une pratique répandue des constructeurs automobile européens de se partager des chassis.

  11. mais d’où sortent tes chiffres Fred? l’année dernière lorsque j’ai rencontré un responsable de CyWorld il y avait deja 80 millions d’utilisateurs sur toutes les éditions confondues!!

  12. C’est une étude super intéressante. Mais comment peut-on expliquer la montée en puissance d’un Facebook alors que les utilisateurs d’Habbo sont plus nombreux? Car c’est plus qu’une question de marketing et d’investissement. Si les utilisateurs sont plus nombreux, ils diffusent l’info eux mêmes?? Donc où est le problème. Où alors comme Habbo est plus ancien, ces utilisateurs le délaissent pour aller sur Facebook. Quant à Yahoo, ils entendent développer une communauté virtuelle avec une vraie utilité. Il s’agit d’une communauté destiné aux anciens élèves de toutes les écoles et les universités. Un vrai réseau pour ces étudiants, leurs écoles et leurs entreprises.

  13. Fred,

    Je partage tout à fait le point de vue de Branislav.

    La comparaison entre Habbo et Facebook est un peu fumeuse ou en tout cas doit clairement préciser ce qu’on entend par “utilisateurs” pour éviter de verser dans le sensationnalisme.

    Si on s’en tient aux membres actifs (c’est à dire connectés) à un moment donné, Habbo est totalement un lilliputien par rapport à Facebook.

    Pour te faire une idée qui a le mérite d’être factuelle, je te propose un rapide tour sur l’ensemble des sites d’Habbo (.com, .co.uk, .fr, .nl, etc.) et la lecture de la boîte “x members online”. En prenant le maximum d’utilisateurs concurrents, on atteint à peine une fourchette entre 50 000 et 100 000 membres…

    Sans aucun doute, Facebook est beaucoup beaucoup plus haut que ces maigres statistiques en termes d’utilisateurs actifs.

  14. @ Olivier > Mmmmmm… il me semble que nous sommes en plein dans une bataille de chiffres. Qui te dis que le 500.000 utilisateurs de Facebook en France sont actifs ?

    Mais là n’est pas la question car ces deux services ne ciblent pas les même audiences (pré-ado pour Habbo).

    @ Thierry > Mes chiffre sont issus de l’étude de la société +8* (publiée en Juillet 07). Revendiquent-ils réellement 80 M d’utilisateurs ?

    /Fred

  15. Fred,

    C’est toi qui a commencé la bataille de chiffres et la comparaison Habbo – Facebook ;-)

    En parlant de pré-ados, tu ne cites pas les frenchies de Chapatiz qui sont sur un modèle assez similaire à Habbo et affichent d’assez gros chiffres de membres en France justement.

    Bravo et merci pour un excellent blog au fait.

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