J’ai déjà eu l’occasion de vous parler de social scoring et des indicateurs-clés des médias sociaux que l’IAB tente de standardiser. Hasard du calendrier, ce ne sont pas deux mais trois approches différentes qui viennent d’être proposées ces derniers jours. Du très quantitatif au très qualitatif, la diversité de ces approches nous permet d’y voir un peu plus clair dans cette pratique encore méconnue.
Tiens d’ailleurs, puisque j’y suis, voici comment je pourrais définir les social media analytics : “La mesure, la collecte et l’analyse de données d’usages et de comportements des internautes au sein des médias sociaux dans le but d’optimiser une stratégie ou une présence”. Cette discipline repose sur des outils, des indicateurs-clés et des méthodes d’analyse. Les pratiques de social media analytics sont assez proches de celles employées pour les web analytics mais moins focalisées sur les chiffres (quoi que, ça dépend des vendeurs).
Approche Altimeter : Beaucoup de chiffres et d’outils
La première méthodologie que je vous propose d’étudier est celle de l’Altimeter Group (dont la réputation n’est plus à faire) associé à l’auteur de Web analytics Demystified (une référence dans la profession) : Social Marketing Analytics. Cette méthodologie décrit dans les détails un certain nombre d’indicateurs de performance (KPIs) exploités par les solutions du marché.
Les auteurs de la méthodologie ont regroupés ces indicateurs par objectifs :
- Démarrage de conversations (“Foster Dialog“) : Part de voix, taux de participation et taux d’engagement ;
- Sollicitation des avocats (“Promote Advocacy“) : Taux d’activité des avocats, influence relative et impact ;
- Facilitation de l’entre-aide (“Facilitate Support“) : Taux de résolution, temps de résolution et satisfaction ;
- Stimulation de l’innovation participative (“Spur Innovation“) : Nombre de suggestions, tonalité des sentiments et impact.
L’influence des pratiques de web analytics est clairement perceptible dans cette méthodologie qui repose avant tout sur les outils de mesure et sur une approche très quantitative. Idéale pour celles et ceux qui se retrouve avec une solution dans les pattes et veulent l’exploiter de façon industrielle.
Approche McKinsey : Quoi ? Qui ? Où ?
Autre approche mais centrée sur la propagation virale, celle proposée par McKinsey : A new way to measure word-of-mouth marketing. L’auteur de l’article a identifié trois formes de bouche-à-oreille : Les témoignages (ceux qui ont vécu une expérience ou testé un produit), les relais (ceux qui pointent vers un témoignage) et les cautions (les “célébrités” qui s’affichent avec un produit). Faire le distingo entre ces trois formes de bouches-à-oreilles est une des clés de la compréhension et de l’analyse des social media analytics.
La méthodologie de McKinsey repose sur la notion de Word-of-mouth Equity qui est fonction de trois critères :
- Le contenu du message (“What?“) qui fonctionne mieux quand il est question de données factuelles sur un produit / service plutôt que de données émotionnelles (qui ont moins de chances d’être relayées en bouche-à-oreille) ;
- Le porteur du message (“Who?“) qui va conditionner l’attention que l’on porte et est en rapport direct avec la crédibilité de celui qui s’exprime ;
- Le media qui sert à véhiculer le message (“Where?“) car il est important de pouvoir sortir du lot et actionner un levier de proximité (certains supports sont saturés comme Facebook et Twitter, d’autres sont plus propices comme les forums).
Même si l’auteur ne se prononce pas sur une méthode arithmétique de mesure, il a le bon sens de rappeler que l’importance de ces trois critères varie en fonction du secteur d’activité (Le “Quoi ?” est plus important pour les produits high-tech, le “Qui ?” est plus important pour les produits bancaires /financiers…).
Approche Forrester : Les objectifs avant les outils
Terminons avec la méthodologie proposée par Forrester : Three Steps To Measuring Social Media Marketing. Dans son rapport, l’auteur explique que les marketeux s’intéressent trop aux indicateurs quantitatifs (qui sont les plus faciles à collecter) et qu’il faut avant tout exploiter les indicateurs en rapport avec les objectifs d’une présence ou d’une campagne.
L’auteur a ainsi identifié six catégories d’indicateurs (User reach, User impact, Volume of participation, Quality of participation, Volume of energy et Quality of energy) qui sont plus ou moins bien adaptés aux objectifs d’une présence / campagne sur les médias sociaux (écoute, dialogue, stimulation, support, co-création) :
Il est donc primordial de définir en amont les objectifs d’une présence sur les médias sociaux et d’exploiter les indicateurs qui sont les plus pertinents. Ainsi, si votre objectif est d’améliorer l’image de marque, il est inutile de prendre en compte le nombre de citations.
Les leçons à retenir des pratiques de web analytics
Je serais bien incapable de vous recommander une approche par rapport à l’autre, les 3 sont intéressantes et à prendre en compte. Il semblerait néanmoins que les avis convergent pour dire que la stratégie (objectifs) doit passer avant la technologie (les outils) et qu’il n’y a pas de solution universelle (chaque cas est différent).
Ceci étant dit, j’attire votre attention sur trois enseignements très importants des pratiques de web analytics qui devraient vous aider dans la mise en place de pratiques de social media analytics :
- Les indicateurs ne sont pertinents que dans la durée (seuls les changements et/ou écarts vous apprennent des choses) ;
- Ne vous contentez pas de budgeter l’abonnement et la mise en place d’un outil, le plus gros du travail est dans l’interprétation (qui ne peut pas être fait par un algorithme) ;
- Les données et interprétations ne valent rien si elles ne sont pas partagées et assimilées par les différents services d’une entreprise (communication, production, vente, direction générale…), la restitution de ces données au travers d’un tableau de bord de même que la pédagogie pour bien comprendre les indicateurs sont essentielles.
Voilà, j’espère que maintenant vous y voyez un peu plus clair et que vous avez les cartes en main pour initier et développer des pratiques de social media analytics en interne (dois-je vous rappeler qu’il serait absurde de les sous-traiter à une agence ?).
Super post, une fois de plus. En les comparant, cela donne une nouvelle vision sur leur point de vue.
Une seule remarque peut-être. les analystics fait par l’agence digitale n’a pas forcément beaucoup de sens, mais cela peut être facilement fait par une agence indépendante externe …
Merci Fred
pour ce très bon article comparatif d’un sujet clé: Graal des agences et marketeurs: Les KPI du Social Media Marketing.
Très intéressant. Ces methodes sont bien à prendre comme des boites à outil et non pas comme des solutions clés en main. Car le bon sens et la logique reste les meilleurs methodes pour mettre en place une procédure analytics pertinente. En ces temps tumultueux on a vite fait de se rassurer avec des tableaux de KPI indigestes qui au final sont sous exploités. Le marketing n’est pas encore une science… tout au plus un algorithme :)))
Article très intéressant et très instructif.
Ayant surtout une grande expérience dans le Web Analytics – je me permets d’insister sur le point outil / technologique.
Aujourd’hui l’offre disponible est très vaste avec des fonctionnalités très étendues. Donc l’aspect outil/technologique n’est pas un problème (bon, ok il y a un coût derrière…).
Le problème est classique: on cherche l’outil parfait – que ce soit en CRM, CMS, Web Analytics, Social Analytics avant même de savoir exactement ce que l’on veut en faire. Première chose à faire est donc de définir clairement ses objectifs “business” et d’en dériver les KPI’s requis. Les 3 méthodes présentées se valent sans doute et chacun devrait y trouver son bonheur.
Cette phase de définition est souvent baclée et le résultat est souvent un “sur-investissement” – on achète une solution extrêmement puissante mais on en utilise que 10% des possibilités. Ou pire un mauvais choix.
Trop souvent, on pense qu’il suffit d’achèter un outil et de générer une (souvent longue) liste de rapports, graphes et autres. Si c’est juste pour faire de “jolis” rapport et pouvoir dire à son boss “oui, oui on fait du Social Media monitoring, regardez!”, c’est (beaucoup) d’argent pour rien.
L’investissement en ressources et budget pour l’analyse & l’interprétation sont souvent sous-estimés.
Il en va de même pour la prise d’actions sur base des enseignements collectés. C’est simple à dire mais en pratique…. Cela requiert souvent un change de mentalité. Et c’est souvent là que se trouve le plus grand défi.
Michael
Il est important de définir ses objectifs afin de choisir l’une des 3 approches. Un article très intéressant qui permet de découvrir 3 approches qui peu connu de tous.
Merci pour cette analyse. Juste un commentaire pour les gens qui comme moi n’ont pas compris pourquoi l’on parlait d’avocats. Un “brand advocate”, c’est une personne qui va défendre la marque ou l’entreprise. La définition est (en anglais) “A customer who has favourable perceptions of a brand who will talk favourably about a brand to their acquaintances to help generate awareness of the brand or influence purchase intent.”
Voilà, si y a des gens qui n’ont plus leur tête, cela pourra aider :)