Jamais je n’aurais l’outrecuidance de vous dire que les réseaux sociaux sont un truc de jeune, d’ailleurs les statistiques nous prouvent le contraire. Il n’empêche que le succès de MySpace repose sur une adoption massive par les jeunes, et que Facebook était historiquement réservé aux étudiants d’universités US. Avec l’adoption massive par le grand public, les plateformes sociales se sont surtout concentrées sur leur croissance et sur le recrutement d’un public toujours plus large pour plaire aux annonceurs. Nous sommes maintenant (presque) en 2012 et les usages autour des médias sociaux se sont généralisés à près des 3/4 de la population des pays occidentaux.
Aucune étude ne confirme réellement le phénomène de banalisation des réseaux sociaux auprès des jeunes (qui fuiraient les plateformes “généralistes” pour éviter d’y croiser leurs parents et professeurs), mais les acteurs du web social semblent visiblement se soucier de l’attractivité de leur offre auprès des étudiants. Plusieurs d’entre-eux ont ainsi annoncé ces dernières semaines des fonctionnalités réservées aux étudiants :
- Facebook est en train de tester avec les universités de Brown et Vanderbilt une version privative des groupes réservée aux étudiants bénéficiant d’une adresse email en .edu : Back To Its Roots, Facebook Tests .edu-Exclusive Groups (c’est en quelque sorte un retour aux sources, et une grosse frayeur pour les éditeurs d’applications ciblant les étudiants comme Inigral) ;
- YouTube étend son programme EDU avec Youtube for Schools, une sélection de vidéos au contenu éducatif, de même que YouTube for Teachers qui permet aux profs d’accéder à une interface de recherche avancée et de créer des playlists éducatives : YouTube for Schools Is Education Hub for the Digital Age ;
- Microsoft vient tout juste de lancer So.cl, une interface de recherche sociale qui repose sur Facebook et apporte un premier niveau de collaboration autour de la recherche de contenus pédagogiques : Microsoft Launches So.cl As A Social Network For Students (à mon avis, Facebook n’est pas le bon endroit pour chercher, mais bon…) ;
- LinkedIn a lancé dans le courant de l’année des options spécifiques aux étudiants pour qu’ils puissent valoriser leurs acquis extra-pédagogiques dans leur profil : Introducing New Profile Sections Designed for Students ;
- Et puisque l’on en parle de LinkedIn, son patron vient d’investir 15 M$ dans la plateforme sociale pédagogique Edmodo : LinkedIn’s Reid Hoffman, Former Facebook VP Back New Social Network Designed To Transform Education.
Autant les grosses plateformes sociales font avant tout preuve de bonne volonté pour tenter de fidéliser (séduire à nouveau ?) les étudiants, autant la plateforme Edmodo propose un environnement particulièrement abouti, l’équivalent des social software suits mais dans le monde de l’éducation (en plus la plateforme est disponible en français). Vous noterez d’ailleurs que ce fameux monde de l’éducation est en plein ébullition avec des projets tout à fait intéressants comme la Khan Academy ou des outils comme Coursekit (cf. The Ingenious Business Model Behind Coursekit, A Tumblr For Higher Education).
Bohatala.com is also recently built start-up on education. Bohatala.com is a free source of education providing free projects and reports, new business plans, research work help, thesis help, assignments, case study solutions, marketing projects and reports, hr projects and reports, etc on various subjects and topics.
Les étudiants sont donc à nouveau au coeur des préoccupations des plus grands acteurs du web social. La question que l’on peut légitimement se poser est “Et les autres jeunes ?“. Et bien figurez-vous que les non-étudiants (mais néanmoins jeunes) ne sont pas en reste, puisque la concurrence de Facebook s’organise avec notamment un futur come back pour MySpace (orchestré de mains de maitre par Justin Timberlake : Justin Timberlake is our new boss) et des mouvements de concentration pour les plateformes sociales alternatives comme Tagged qui vient de racheter Hi5 (Facebook’s Leftovers? Social Network Tagged Acquires hi5).
J’attends de voir comment tout ceci va évoluer, mais je pressens que 2012 va être une année passionnante…
Voici ce qui m’interpelle à vrai dire dans ce billet : c’est qu’en toile de fond je perçois l’absentéisme des écoles et universités.
Elle sont débordées par le phénomène des médias sociaux et sont au bord de la démission après être passées par l’option du suivisme : “mettons-nous aussi dans les médias sociaux puisque les alumni y sont déjà…
Seulement voilà : elles ne récupèrent absolument pas d’une main ce qu’elles ont préalablement perdu de l’autre.
Elles doivent travailler à :
– garder la main sur leur souveraineté ;
– rester une destination pour leurs alumni : à savoir une marque ;
– ne pas oublier que la marque est source de légitimité de l’information: si elle l’héberge et en détient la primeur, elle conserve encore l’aura minimale qui la consacre en tant que telle ;
– sortir du déni : comprendre que l’attachement d’un alumni à sa marque, à son diplôme, à son école, est suffisamment fort pour qu’elles ne soient pas suivistes en acceptant de dépendre de linkedin ou facebook : quand une asso d’alumni publie sur le web la prochaine date de sa soirée de fin d’année, elle ne doit pas perdre là l’opportunité dont il s’agit pour drainer du trafic dans son environnement.
– retrouver son modèle économique : c’est ce dont elles sont dramatiquement, je dis bien dramatiquement dépossédées actuellement. Les chasseurs de tête vont payer des accès sur Linkedin et Facebook pour chasser les alumni, les asso d’anciens y perdent une manne de revenu qui risque de les paralyser.
Il ne fait aucun doute pour moi que la seule façon de s’affirmer de façon différenciante dans ce contexte ultra compétitif, pour les assoc d’alumni et les écoles et universités, c’est de reprendre la main.
Elles vont sortir de cette phase de perplexité et comprendre bientôt qu’elles ont toute légitimité pour y parvenir.
C’est très bien que tout ce que tu listes existe.
Mais les institution académiques doivent redevenir pour leurs étudiants et leurs anciens leurs propres autoroutes, elles doivent retrouver légitimité pour y rétablir des péages acceptables, et les autres médias sociaux doivent être ce qu’ils sont déjà: des routes nationales, des chemins de traverse en tous genre. On ne peut pas s’en passer, mais ils ne peuvent pas noyer les alumni et prendre la pain sinon le monde académique va payer une lourde soustraction dans ses revenus et développer une dépendance à ces tiers éditeurs qui sera insurmontable : parce que ces derniers savent très bien que “big is leverage”.
@ Frédéric > “garder la main sur leur souveraineté”, heu… quelle souveraineté ? Une fac ou école n’a aucune souveraineté sur la vie sociale d’un étudiant. Éventuellement elle peut l’aider à façonner son projet professionnel, mais sans plus.
C’est un fait intéressant que ce retour aux racines. En France cependant, on assiste à un autre phénomène, de plus en plus d’établissements d’enseignement supérieur travaillent (où envisagent) sérieusement de se doter de leur propre “intranet social” ou “réseau social interne”, sans nécessairement regarder ce que propose les leaders du secteur d’ailleurs. Envisager comme moyen de controle, comme facteur de différenciation, comme preuve d’indépendance vis-à-vis du secteur “marchand”… ce genre d’initiative semble malheureusement peu prendre en compte les besoins et aspirations des usagers ni les moyens pour y parvenir efficacement. Phénomène à suivre malgré tout.
@Manuel Il s’agit de la même tendance que l’évolution d’un intranet d’une entreprise vers des solutions sociales. Ce qui est intéressant, c’est de voir finalement, comme tu le soulignes, la faible prise en compte des besoins complets des étudiants (et donc pas seulement liés à l’enseignement pédagogique dispensé dans l’établissement). A ne pas couvrir tous les besoins, on laisse la place à l’utilisation déportée sur d’autres outils en dehors qui joue donc contre la vocation première du réseau social interne à l’école ou l’université.
Il est effectivement intéressant de voir comment les principaux réseaux sociaux développent leurs fonctionnalités pour les étudiants et jeunes diplômés.
Il faut aussi compter sur des plus petits réseaux spécialisés sur ces cibles comme Yupeek ou Wizbii concernant la France.
L’accès au premier emploi étant de plus en plus difficile et les jeunes diplômés étant parmi les plus touchés par le chomâge, les réseaux sociaux y voient l’opportunité de développer leur plateforme pour mettre en relation candidats et entreprises et ainsi prendre des parts de marché aux jobboards.
Bonjour,
Voilà un article et une discussion intéressante qui me touchent directement.
M’occupant du BAIP (Bureau d’aide à l’insertion professionnelle) d’une université, je suis confronté à ce besoin de conserver le contact avec nos Anciens. Besoin pour la valorisation des compétences universitaires, et pour développer le contact monde du travail / étudiants en formation.
Les outils du web social sont tous intéressant dans ce sens. Reste le problème des moyens que l’institution peut engager.
D’un côté, doter l’université de son propre réseau social serait certainement le mieux mais le succès d’un tel outil est plus que aléatoire :
– fortement couteux pour avoir quelque chose qui tienne la route (la concurrence des réseaux style Facebook sont une concurrence face à laquelle nous seront toujours perdant),
– nécessite l’investissement des enseignants, au moins au début, pour animer leur communauté de formation. Chose inimaginable, en dehors de quelques geek évidement, tant que leurs activités pédagogiques ne seront pas valorisés. Éternel débat.
– nécessite une vraie offre de service pour les Anciens, le “sentiment d’appartenance” étant très faible dans les universités (contrairement aux écoles) du entre autre à la diversité des formations et à la taille des effectifs,
– nécessite aussi un lien fort avec l’entreprise : pourquoi communiquer sur une plateforme restreinte à une université alors que d’autres outils lui permettent de diffuser (offre de stage par exemple) largement vers toutes les universités et écoles ?
D’un autre côté, utiliser les réseaux pro existants, Viadeo et LinkedIn :
– les anciens y sont et sont facilement retrouvables et contactables. L’investissement pour eux est moindre (accepter l’invitation à un hub par exemple),
– coût 0 pour l’université (en dehors d’au moins un compte pro pour l’animateur)
– par contre, on perd toute l’exploitation en backend des données et statistiques d’utilisation. Niveau pilotage de l’établisement : bénéfice nul.
– on incite les étudiants à y être et donc éventuellement à devoir prendre un compte payant pour bénéficier des outils… Niveau éthique, c’est moyen.
Le principal problème est là : externaliser, donc perdre le pilotage de l’outil et le contrôle des données ou internaliser et investir dans un réseau propre qui ne aura du mal à se faire une place parmi les déjà trop nombreux réseaux existants et sur lesquels les étudiants et anciens sont.
Et d’ici à ce que l’AMUE propose une mutualisation de projet universitaire développé par et pour les universités, je serai à la retraite !
Donc pour l’instant, je me contente de tester un hub viadeo pour garder le contact avec les Anciens et d’utiliser au mieux les quelques application sur l’ENT pour les étudiants…
Pour le reste… :(