Twitter poursuit son évolution pour devenir un média

Saviez-vous que Twitter venait de fêter son sixième anniversaire ? Six ans, c’est à la fois beaucoup et peu. Suffisamment pour consolider une base de 150 M d’utilisateurs actifs (pour presque 500M de comptes créés) et une activité en perpétuelle croissance qui atteint maintenant 400 millions de tweets publiés par jours. En terme de rentabilité, ils ne communiquent pas beaucoup sur leurs résultats, mais certains estiment que le service pourrait générer 1 milliard de $ de C.A. d’ici deux ans (Twitter could reach $1B in revenue by 2014).

Pour résumer une longue histoire, Twitter est une authentique réussite, la meilleure preuve de cette réussite est que le service a été pratiquement cloné (avec succès) en Chine : Sina Weibo Breaks 300 Million Registered Users, Mobile Users Growing. Le plus intéressant dans cette histoire, c’est que la croissance de Twitter ne se tarit pas, bien au contraire : Twitter Is Now Growing Way Faster Than Facebook.

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Encore plus intéressant, le service commencerait à séduire des tranches de population lassées par Facebook : Les adolescents français migrent vers Twitter. Les raisons invoquées pour cette migration sont en rapport avec la confidentialité, ou plutôt la possibilité de publier des choses de façon anonyme, un peu comme sur les services de messagerie instantanée.

Un service solidement ancré dans le quotidien des internautes et mobinautes

Que l’on aime ou pas Twitter, force est de constater que ce service fait partie du quotidien des internautes, mais également des Français, non pas par le nombre d’inscrits, mais par la sur-représentation d’hommes et femmes politiques qui l’utilisent, ainsi que des journalistes (tout le monde se souvient du tweet de soutien de Valérie Trierweiler). Futile pour certains, c’est devenu un authentique outil de travail pour d’autres (Les journalistes parlent aux journalistes).

Difficile d’identifier de façon précise les facteurs-clés de succès de Twitter, mais je suis persuadé que son ambivalence y a beaucoup participé. Ce service, et c’est ce qui le rend unique, est en effet aussi à l’aise pour le grand public que pour les pro (BtoC et BtoB), et il a depuis le début été conçu pour les ordinateurs et pour les terminaux mobiles. D’ailleurs, le succès de Twitter et des smartphones sont intimement liés, ce n’est ainsi pas un hasard si Twitter est intégré de façon native à la dernière version d’iOS. À ce sujet, vous noterez que des efforts constants ont été réalisés pour peaufiner les versions mobiles du service :

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Les débuts de Twitter ont été pour le moins chaotique, car le service fascinait autant qu’il intriguait. De nombreuses discussions animaient ainsi la blogosphère pour définir ce qu’était Twitter : Je tweet donc je suis (heu… je suis quoi déjà ?). Aujourd’hui encore, il existe un flou sur la définition exacte du service. Je pense néanmoins ne pas me tromper en disant que Twitter est avant tout un outil de communication : au même titre que le téléphone ou l’email, il sert à communiquer de façon individuelle ou collective. Selon cette définition, Twitter n’est pas un réseau social, mais les usages qu’il induit s’étendent bien au-delà de la simple transmission d’informations.

Ce qui est fascinant avec Twitter, c’est que le service n’a (en surface) quasiment pas évolué depuis sa création : toujours des messages de 140 caractères. Outre la refonte majeure du site web en 2011, les équipes n’ont procédé qu’à des enrichissements mineurs et très progressifs pour ne pas perdre la “philosophie” du service. Les derniers efforts d’enrichissement ont surtout été réalisés dans le but de garder plus longtemps les utilisateurs sur le site :

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Ne vous y trompez pas, l’objectif de Twitter est de faire évoluer le service pour le transformer en un véritable média, une destination plutôt qu’un moyen d’accès. Dans cette optique, on comprend mieux l’intérêt de la fonction de consultation des contenus qui n’est autre qu’un media player. Ceci étant dit, il reste encore un long chemin à parcourir pour que Twitter soit reconnu en tant que tel. Il va surtout y avoir des choix douloureux à faire pour trouver un équilibre entre la place accordées aux contenus et l’offre publicitaire (Twitter faces the same dilemma as the New York Times).

Des pratiques bien spécifiques de social marketing

Outre le format des messages et les contraintes / possibilités techniques, ce qui caractérise Twitter est l’usage qui en est fait par les marques. Les possibilités sont nombreuses (relais de contenus, support client, déstockage de produits…) et il n’y a pas de véritable recette miracle : il faut se lancer et trouver la bonne approche, le bon rythme de croisière. La chose qui perturbe le plus les marketeurs est que l’on peut indifféremment exploiter Twitter avec un compte nominatif ou un compte générique. Toujours est-il que les pratiques de social marketing sont complètement différentes de celles utilisées sur d’autres supports (Twitter marketers, why almost everything you know from Facebook is wrong).

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Je ne rentrerais surtout pas dans le débat de savoir si cette plateforme est meilleure que les autres (Why Twitter Is a Better Brand Platform Than Facebook), mais je vous mettrais en garde contre les approches packagées qui ne fonctionne pas forcément pour toutes les marques (On Twitter, big brands like The Gap struggle to keep up with customer service).

Je pense ne pas me tromper en disant que même si certaines opérations particulièrement originales génèrent un peu de buzz (Viral Marketing At Its Best: Animating a Twitter Timeline), l’important est avant tout de fidéliser son audience avec des contenus pertinents. Traduction : pas de chasse aux followers ou d’opérations virales, une présence sur Twitter se travaille sur le long terme (j’ai mis plus de 5 ans à dépasser les 50.000 followers).

Longtemps délaissés, les annonceurs bénéficient depuis peu d’un regain d’intérêt avec des améliorations pour leur faciliter la tâche :

Très en retard par rapport aux autres plateformes sociales, les équipes de Twitter travaillent donc d’arrache-pied pour séduire les annonceurs et leur proposer des offres plus sophistiquées (et générer ainsi des revenus plus importants). Dans la mesure où le service reste encore très rudimentaire (toujours ces messages de 140 caractères), il reste donc une infinité de possibilités pour monétiser les utilisateurs ainsi que les contenus.

Puisque les patrons envisagent de faire de Twitter un média dans le média (au même titre que Facebook ou Yahoo!), ils vont donc devoir muscler les offres proposées aux annonceurs pour financer cette évolution. La route sera longue et compliquée, mais je ne vois pas de raison majeure d’échec : ils se sont très bien débrouillés ces 5 dernières années, ils parviendront bien à garder le cap les 5 suivantes. À moins qu’une IPO ne vienne bousculer tout ça…

Dans tous les cas de figure, Twitter reste une destination incontournable pour les marques, aussi bien d’un point de vue marketing, que commercial, que pour faire de la communication de masse ou pour gérer la relation client. De plus, inciter vos collaborateurs à Tweeter permet de leur faire découvrir une nouvelle façon de faire circuler l’information et de collaborer.

13 commentaires sur “Twitter poursuit son évolution pour devenir un média

  1. Mais pourquoi n’y a-t-il pas de bouton de partage Twitter ou Facebook sur ce site ? C’est un peu un comble ;-)

  2. Merci Frédéric pour cette excellente analyse qui sort des annonces fonctionnelles. Etonnement, twitter a du retard, reste rudimentaire mais il incarne à lui tout seul une révolution sociolinguistique. Il a popularisé le “status update” en 140 caractères, la publication en temps réel (LiveTweet), les codes d’appellation (@), d’ancrage (#) et de recommandation (+1 RT) intégrés dans Google+ et Facebook. Certainement, le signal majeur de la fuite des commentaires et le compagnons majeurs de la SocialTV …
    Voilà, un petit commentaire pour un joli post qui compte tout de même 114 RTs et 0 commentaire à l’heure où je le poste … il fallait donc le faire ;-)

  3. J’utilise Twitter pour sa simplicité et l’absence de publicité, même si les services rendus par Twitter à ces clients sont souvent déguisés et c’est assez désagréable.

    Transformer un service devenu public en machine à fric ! Est-ce bien joué … ?

  4. Frédéric,

    Très bon article sur Twitter.

    Je suis moi aussi convaincu que Twitter va devenir un média à part entière et que des fils Twitters pourront se constituer comme les fils d’agence de presse actuel. C’est le média de l’instantané, de l’immédiateté… Aux marques et aux équipes techniques aussi d’apprendre à gérer des pics de trafic souvent imprévisibles… et des effets boules de neiges pas facilement contrôlable…

    Bien cordialement,

    Gabriel Dabi-Schwebel
    http://www.1min30.com

  5. Excellent article, qui (comme l’a fait remarqué Fadhila) change des articles purement descriptifs déjà sortis en masse… Je lis souvent ton blog et l’apprécie de plus en plus. Je n’avais jamais laissé de commentaire pour le dire mais c’est maintenant chose faite :)

  6. Merci pour l’article détaillé avec plusieurs liens. Un incontournable à lire d’après moi !

    Je crois également que le succès de Twitter viens justement de sa simplicité «rudimentaire» et j’espère ne pas voir trop de publicité dans les années qui suivent.

  7. J’aime vos articles toujours pertinents et celui ci n’échappe pas à la règle.
    J’ai l’impression que le succès de Twitter reste sa naïveté sur le plan des annonces. On ne se sent pas pollué, ni dirigé. Cela reste un accès à l’information simple et authentique. Il ne faudrait pas que dans son approche commerciale, Twitter perde ce côté qui nous plait tant et suive la trajectoire de facebook comme par exemple de proposer des tweets payants qui resteraient en haut des listes pendant 1 heures.

  8. Perso, je pense que si Twitter tente de devenir un média, il ne survivra pas. La force de l’outil réside en sa capacité à ne pas être un lieu de destination et donc s’intégrer facilement et naturellement (via l’API) dans tout un écosystème qui grandit autour de lui. D’ailleurs, une grande partie des Power Users passe par un client tiers pour gérer son/ses comptes… la mixité des usages de ses utilisateurs (WebApp, Software, Plugin, mobile…) rend très complexe la moindre tentative de mise en avant de contenus par les techniques déjà connues.

    Je vois plus la monétisation de Twitter côté back office, ce qui permettrait aux professionnels de mieux gérer et optimiser leurs usages : la gestion multi-utilisateur (déjà en phase de déploiement), des fonctionnalités plus riches autour des listes (comme les cercles de Google+) et du moteur de recherche, des outils intégrés de statistiques, etc.

    Certaines de ces possibilités existent déjà sur des services tiers mais ils sont dépendants de l’API et des changements techniques de Twitter, et nécessitent un important travail de croisement des données pour l’analyse et le reporting… Pas idéal pour une grande marque !

    Ce n’est que mon point de vue ;)

  9. Très bonne analyse. J’ajouterai qu’en échange les médias sont dopés par Twitter et notamment la PQR. Avant twitter je ne lisais principalement des médias nationaux, avec twitter tous les médias régionaux sont à égalité avec les médias nationaux. C’est celui qui sort la news le premier ou la plus locale qui gagne, et c’est souvent la PQR dans mon cas car mon entreprise est implantée partout en France

  10. Merci pour cette article synthétique et aux liens bien pratiques pour développer les points d’intérêts.
    Je pense que l”évolution constante de Twitter est aussi du au fait qu’ils ont su écouter et prendre en compte les retours des utilisateurs au fil des évolutions et expérimentations.
    Esperons qu’ils continueront à progresser ainsi et à trouver des leviers de rentabilisation qui n’iront pas à l’encontre de l’expérience utilisateur.
    Entièrement d’accord avec @giluzful, les listes sont vraiment un moyen puissant de suivre les news de ses différentes “tribus”.

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