Plébiscité dans les années 2005, les blogs ont petit à petit perdu de leur aura pour finir complètement dans l’ombre de Facebook ou Twitter. La vérité est que le blog est un support qui fait peur (“on va me critiquer dans les commentaires“) et qui intimide (“il faut impérativement définir une ligne éditoriale“), les marques s’en sont donc éloigné pour concentrer leurs efforts sur des plateformes a priori plus simples d’accès (Facebook, Twitter, TumblR, Pinterest…). Pourtant je n’ai eu de cèsse de rappeler que la légitimité de ce support (Non, les blogs ne sont pas morts, bien au contraire !) de même que la qualité des conversations qui y sont hébergées (Des commentaires aux communautés verticales).
C’est donc avec beaucoup de perplexité que j’ai assisté ces dernières années à une lente érosion de la blogosphère, qui a mené à un phénomène de concentration que nous connaissons tous. Aujourd’hui le blog est la dernière roue du carrosse, le chantier que l’on démarre à contre-coeur une fois que la marque est installée sur les grosses plateformes sociales précitées. Pourtant, et jusqu’à preuve du contraire, le blog reste le support le plus performant et pérenne pour se faire un nom (littéralement). Le problème est que pour tenir un blog, il faut de la régularité et de la cohérence dans la prise de parole. Il y a bien évidemment des marques qui n’ont pas grand-chose à raconter et préfèrent filmer les exploits de sportifs de l’extrême pour détourner l’attention sur la composition de leurs produits, mais ce n’est pas réellement un modèle à suivre.
Tout le drame des médias sociaux en 2013 est que l’on confond vitesse et précipitation : il y a toujours une nouvelle tendance à suivre (ex : le Harlem Shake) et une réputation à améliorer. La plupart des marques se retrouvent donc dans l’impasse de la course aux fans et dépensent une part toujours plus importante de leur budget en community management, un terme sacrément trompeur dans ces pratiques se résument généralement à essayer de sortir la meilleure blague ou la photo la plus rigolote pour faire remonter la taux d’engagement (sur lequel est indexé le Edge Rank de Facebook).
Ce qui me désole, c’est que la recette est pourtant connue de tous :
- Acquérir de la légitimité avec un contenu à valeur ajoutée (en plus, c’est bon pour le référencement)
- Augmenter sa visibilité en amplifiant la portée de ces contenus (en plus, ça génère du trafic gratuit).
J’ai comme l’impression que les annonceurs accordent beaucoup trop d’importance à la seconde partie en se focalisant sur l’amplification. Le problème est que si vous n’avez rien de bien intéressant ou pertinent à dire, ce n’est pas en le criant que vous allez améliorer votre image de marque ou la valeur d’usage de vos produits.
Voilà pourquoi je préconise systématiquement à mes clients d’investir en priorité dans la création de contenu plutôt que de gaspiller leur budget dans de la visibilité payante. Pour clarifier le message : embauchez en priorité des rédacteurs plutôt que des community managers. Nous sommes bien d’accord que l’un ne remplace pas l’autre et qu’ils se complètent (Why social networks and blogging go together like peanut butter and jelly Enter your email address).
Bref, tout ça pour dire que je suis persuadé que l’année 2013 va être l’année du retour sur le devant de la scène des blogs. Et je ne suis pas le seul à le penser, car deux grosses plateformes sociales viennent de se lancer sur le créneau des blogs.
Il y a tout d’abord LinkedIn qui fait un gros travail de curation autour des publications de 250 leaders d’opinion : LinkedIn Today – Who to Follow. Ces VIP bénéficient d’un re-travail éditorial sur les articles publiés à droite à gauche. Certes, ces articles n’ont pas été publiés sur la plateforme, mais LinkedIn pourrait très bien étendre le périmètre de son LinkedIn Today avec un outil de publication simplifié : Why LinkedIn is a Sleeping Giant of Publishing. L’opportunité de publier des articles sur une plateforme avec plus de 200M d’utilisateurs et d’innombrables groupes thématiques pourrait en séduire plus d’un membre en quête de reconnaissance.
Il y a ensuite Quora qui vient d’annoncer sa plateforme de blog : Quora Launches Blogging Platform With Mobile Text Editor To Give Every Author A Built-In Audience. Voilà une très bonne manoeuvre de diversification pour cette plateforme de Questions / Réponses collaboratives, car elle permet aux membres de poursuivre le même objectif : gagner en crédibilité. L’interface est rudimentaire, mais elle remplit parfaitement sa fonction première.
Vous constaterez au passage que Twitter adopte une stratégie inverse en fermant Posterous à peine une année après son rachat (grosse erreur) : Twitter Is Shutting Down Posterous, A Site For Blogging.
La prise de parole, structurée ou non, semble donc être un point de passage obligatoire pour les marques qui ont un minimum d’ambitions dans leur présence sur les médias sociaux, surtout dans le secteur BtoB. L’objectif prioritaire étant de se constituer une audience durable et de commencer à fédérer une communauté autour de prises de parole pour générer des interactions à valeur ajoutée. Entendons-nous bien : rien ne vous empêche de monter des opérations de buzz ou de recrutement massif de fans, mais nous savons que le seul gagnant de l’histoire sera Facebook.
Nous verrons si 2013 était bien l’année de grand retour des blogs, toujours est-il que celui qui tient les reines est encore une fois Google : Is Google’s AuthorRank just a myth?.
Bonjour,
J’ai apprécié votre papier qui nous conforte dans notre démarche d’une recherche de notoriété et de qualité éditoriale pour notre “Webzine” basé sur une plateforme blog.
Je reste persuadé que le sérieux des contenus individuels ou associatifs sur la toile passe par le blog et non par la “social-sphère” qui nous semble imposée par des phénomènes de mode qui formatent l’information à des fins purement économiques et commerciales.
Je me permettrais de faire un article sur votre papier sur le Kiosque aux Canards.
Cordialement
Bruno
Je ne peux être que d’accord avec ton analyse (évidemment) sauf sur la partie Red Bull.
Pour Moi Red Bull est en train de s’approprier la valeur “courage” et plus important que le contenu il y a les valeurs parce que c’est là dessus que se base une entreprise.
Après ils pourraient décliner autour d’un blog évidemment mais cela ne resterait qu’une legitimation de plus en ce qui les concerne.
Enfin, c’est mon point de vue en tous cas, ne travaillant pas pour eux, je ne sais pas précisément leur strat.
Merci pour cet article qui me conforte dans l’idée de me concentrer sur mon blog. Je sais que mes efforts ne seront pas vains.
Je vous rejoins entièrement sur l’ensemble du propos. L’aspect référencement naturel que vous avez évoqué mériterait à lui seul un article : c’est bien le contenu qui génère un trafic pérenne sur les sites web. Si ce contenu est qualitatif et apporte quelque chose de plus au lecteur, c’est mieux : le trafic généré devient ciblé et qualitatif.
Le contenu produit sur une plate forme dont on est propriétaire est fait pour durer, à l’inverse des “cris” que l’on peut pousser sur les réseaux sociaux (j’adore vraiment cette phrase : “si vous n’avez rien de bien intéressant ou pertinent à dire, ce n’est pas en le criant que…”.
Bref, générons notre contenu chez nous et utilisons les réseaux sociaux pour les faire connaître !
Qu’ils abandonnent tous les blogs, pas de souci, ça fera plus de place pour nous !
Ils oublient aussi une autre chose FONDAMENTALE à mon avis : Le blog permet de stocker chez soi les contenus, là où ils sont dans d’autres entreprises sur les réseaux sociaux par exemple !
Personnellement je suis très surpris de voir les marques tenter de capitaliser sur les réseaux sociaux. Ce sont des supports dont la pérennité est incertaine, à la politique de confidentialité douteuse, et qui peuvent confisquer votre espace de jeu en un revers de main… étonnant.
@ Greg > Le cas de Red Bull est délicat à traiter dans la mesure où ils irradient complètement les médias sociaux avec des contenus de grandes qualité, mais qui ne génèrent pas forcément de conversations (uniquement des réactions). Ceci étant dit, si leur objectif est de gagner en exposition médiatique, alors leur approche est la bonne, d’autant plus qu’ils capitalisent sur RedBull.tv. Par conte, le référencement des vidéos étant très aléatoire, ils n’existeront sur les médias sociaux qu’au travers des vidéos qu’ils publient régulièrement, le jour où ils arrêtent ou ralentissent, que restera-t-il ?
Je suis pleinement en phase avec l’argumentation selon laquelle les marques confondent souvent vitesse et précipitation. La notion de temps est effectivement au cœur de ce débat sur l’utilité des blogs. Les marques sont friandes des coups d’éclats, du tangible et du court terme. Elles ont pris l’habitude de faire des dépenses de communication pour des actions ostentatoires, autrement dit des choses qui se voient dans l’instant présent mais qui ne durent pas nécessairement. (Ne dit-on pas “faire de l’image”? ). Autrefois, les grandes marques construisaient leurs campagnes à coup de pages entières, de demies-pages ou de quarts de pages dans les meilleurs magazines. Le nec plus ultra était de “se payer” la première de couverture. A moins de disposer de budgets colossaux, force est de constater que l’on traduit souvent mieux les attributs d’une marque par le partage d’articles de fond plutôt plutôt que par des slogans ou des raccourcis publicitaires. Tous le dirigeants n’ont sont pas encore convaincus d’autant plus qu’ils ne connaissent pas nécessairement très bien les attributs de leur marque. Justement la définition d’une ligne éditoriale et le travail de veille sur les réseaux sociaux les aiderait non seulement à structurer la pensée de la société vis-à-vis de la marque (son positionnement) mais également à élaborer des stratégies à moyen-long terme sur le marché. La difficulté de l’exercice réside cependant dans la décentralisation horizontale du partage de l’information (donc du pouvoir) en interne.
Cette tendance s’explique également par la conjoncture économique et cette obsession du ROI à court terme. Le travail de rédaction d’articles et de publication dans un blog est une activité qui s’inscrit dans la durée sans porter des fruits du jours au lendemain. Bloguer, c’est semer pour l’avenir. La propension des marques à recruter des Webmasters plutôt que des Community Managers traduit bien cette obsession du retour sur investissement. Les dirigeants d’entreprises (du moins de PME) sont bien plus soucieux d’augmenter leur visibilité que de partager du contenu à valeur ajoutée. La règle du jeu a pourtant changé de manière irrémédiable avec l’avènement de web 2.0 : “Ce qui rend les marques influentes n’est plus leur taille mais leurs communautés “(Chuck Bryner – DDB Worldwide).
Je ne peux qu’être d’accord avec cette analyse.
Je tiens un blog sur le golf depuis 2008 et je continue à l’alimenter régulièrement, ce qui en fait un blog vivant. Certaines marques viennent d’ailleurs me voir pour me faire part des nouveautés.
Article tout à fait pertinent. Les marques qui veulent se rapprocher des consommateurs ne peuvent faire l’impasse d’une présence active et pertinente sur les réseaux sociaux (facebook, twitter,…). D’une part parce que leurs clients y sont attendent d’elles dialogue et réponses. Mais aussi parce qu’en écoutant les consommateurs en temps réel les marques apprennent à mieux les satisfaire. Cela dit, si la conversation a son intérêt, le blog, en complément est un bon moyen pour nourrir la marque sur ses valeurs et son positionnement. C’est l’un des meilleurs leviers pour l’alimenter en contenu en dehors du “day to day business” ou du “small talk”. C’est ce que nous faisons, par exemple chez Orange France, avec notre blog lecollectif.orange.fr (lancé en parallèle de nos premières actions sur les réseaux sociaux). Nous y apportons quotidiennement un décryptage des grandes et petites révolutions numériques, d’où qu’elles proviennent d’Orange ou d’ailleurs). Avec un seul but proposer à ceux que ça intéresse une meilleure connaissance et appréhension de ce que les nouvelles techonolgies apportent à notre vie de tous les jours. Ce travail rédactionnel n’est pas anecdotique. Il mobilise de l’energie et des ressources et participe à un travail essentiel, plus en profondeur, en totale complémentarité avec ce que nous faisons par ailleurs sur les réseaux sociaux. L’un de va pas sans l’autre !
Bonjour,
Cela va dans le sens du content markting annoncé partout. Et le “content”, à ce que je sache, c’est avec un site ou un blog que l’on en produit, pas avec Twitter ou Fb…
Donc, la boucle se boucle lentement, mais surement, et la roue se réinvente une fois encore.
Merci Fred pour ce post qui réconforte tous ceux qui s’investissent dans un blog sur le long terme en privilégiant l’analyse et le contenu, en complément de la spontanéité d’un Twitter ou d’un Facebook…
On ne dit pas plutôt “tenir les rênes”? ou alors s’il y a un jeu de mots, je l’ai pas compris!!!!
Très bon article ! Quand les annonceurs auront compris que le earned media est un pilier et facteur de réussite d’une stratégie web tournée sur le long terme, et bien il n’y aura plus de travail pour nous les agences lol. Bon si, il reste pas mal de travail en fait…
Merci pour cet article d’encouragement à la patience dans notre traversée du désert. Oui, le gazouillis lassera et passera. Le gazouillis est “pré-verbal” et, pour jouissif qu’il soit, il est (comme le narcissisme primaire) destiné à s’éteindre dans le ba-b-log… Pour le dire sérieusement, je suis d’accord avec vous : Twitter et autres réseaux sociaux ignorent “la qualité des conversations qui … sont hébergées” sur les blogs. Le gazouillis est bon pour les mobs idéologiques, mais léger dans le fond (140 c.!). Je crois cependant que les blogs ne reprendront le dessus que si le politique fait de même.
Et merci pour vos propositions d’amélioration des “commentaires”.
Edit : bien entendu je voulais écrire “owned media” -_-‘
Je ne peux que valider cet avis, Blog = contribution personnalisée, exposition de son expertise et/ou de ses convictions. C’est un engagement et c’est surtout un atout pour les entreprises qui sauront mettre en musique ce potentiel, tout autant pour les professionnels indépendants.
Je ne parle pas de blog passion (que je trouve important, une source d’évasion pour ceux qui possèdent un blog perso à vocation ludique ou plaisir) mais de blog professionnel.
L’auteur revient avec raison sur la recette ; un bon contenu (qui fait sens et offre une valeur ajoutée) qui surprend, instruit, séduit, et un réseau qui amplifie et valorise.
Et sa préconisation client d’investir dans le contenu me plait d’autant plus qu’elle correspond à ma conviction intime.
J’ai rédigé un billet sur une “méthodologie” à mettre en place, qui consiste à organiser cette contribution autour de comités éditoriaux : En route vers les réseaux dynamiques : http://lebienveilleur.com/2013/02/13/en-route-vers-les-reseaux-dynamiques/
Je vous invite à le consulter, une piste à suivre … où il est question d’inciter et d’accompagner les collaborateurs dans leur désir de contribution.
ET Merci Fred pour ce billet !
Analyse confirmée par eMarketer dans : http://www.emarketer.com/Article/Brands-Leverage-Influencers-Reach-on-Blogs-Social/1009695
Et on s’en réjouit !
Vive la pertinence ;-)
Happy blogging!
Merci
Le blog implique également d’aborder l’évolution google et l’author rank qui se met en place de plus en plus sûrement. Ecrire, apporter un contenu “utile” et de qualité, c’est semer pour l’avenir de ce point de vue également
Très bon billet, cela valide ce que je pensais. Je trouve d’ailleurs le rôle des blogs d’autant plus important en B2B, principalement pour faire du brand content de qualité. Le partage de l’expertise sur un blog est, je pense, un élément clé dans la différenciation et la construction d’un positionnement.
Ouf ! me voilà rassurée en tant que “nouvelle arrivante” sur la toile …