Des marques utilitaires aux marques servicielles

Avant, quand un annonceur faisait une campagne de communication, elle gardait les résultats pour elles. Mais avec l’avènement des médias sociaux, la popularité d’une marque est immédiatement visible à son nombre de fans, followers… Du coup, tous les annonceurs se sont lancés dans une course aux fans. Je ne reviendrais pas sur le bienfondé de cet objectif, ni sur les dérives qu’il génère, ce n’est pas l’objet de cet article. Le problème est que toutes les marques ne bénéficient pas d’un héritage légendaire (Harley Davidson, Ferrari…) et ne proposent pas de produits d’un très haut niveau de qualité (Apple, BMW…). Je ne suis pas en train de vous expliquer que la bonne stratégie est d’avoir la meilleure qualité de produit possible (cela augmenterait considérablement les prix de vente, donc le pouvoir d’achat), mais que toutes les marques ne sont pas égales quand il est question de fédérer une base de fans.

Du coup, certaines marques s’efforcent de travailler leur côté affinitaire, notamment en sponsorisant des sportifs de renom (Nike) ou des exploits sportifs (Red Bull), tandis que d’autres choisissent plutôt de s’engager dans des actions de solidarité ou d’écologie (Nature & Découverte, Patagonia…). J’imagine que vous connaissez tous ces exemples, on nous les ressort à chaque fois qu’il est question de brand content. Le problème est de savoir ce que l’on peut faire avec les autres marques : celles qui se contentent du strict minimum (un produit acceptable pour un prix bas) ou qui se moquent de la satisfaction puisque le client ne peut pas vivre sans ce qu’elles proposent (banques, assurances, opérateurs téléphoniques…).

Pour toutes ces marques utilitaires (“je consomme parce que j’ai besoin, et non parce que j’ai envie“), il y a deux possibilités : se fabriquer une identité ou une histoire, comme Archiduchesse ou Le Slip Français (pourtant sur des thématiques qui ne font pas rêver), ou rendre service à ses clients ou prospects pour gagner leur reconnaissance et leur fidélité. C’est ce que l’on pourrait appeler des marques “servicielles”, des marques qui rendent service. Je déteste ce mot, mais c’est ce que j’ai trouvé de mieux (je suis ouvert à vos propositions).

Dans cette optique, on troue un certain nombre d’exemples très intéressants dans des secteurs d’activité improbables :

  • La téléphonie mobile, avec AT&T ou Vodafone qui proposent des casiers pour recharger votre téléphone dans les gares ou aéroports ;
  • Le papier hygiénique, avec Charmin qui propose une base de données pour localiser et noter les toilettes publiques (SitOrSquat) ;
  • Les compagnies aériennes comme KLM avec son service Meet & Seat, ou Delta avec son Baggage Tracker (j’ai également entendu parler de l’aéroport de Francfort qui propose un service de consigne pour les manteaux proposé à ceux qui visitent des pays chauds pendant l’hiver).

Certes, ces services coûtent de l’argent, mais ils permettent de se démarquer de la concurrence et son certainement bien plus efficaces pour la mémorisation et la préférence de marque. En cherchant bien, on trouve d’autres exemples très malins :

  • Mattel qui propose des minutes de WiFi gratuit dans les aéroports à ceux qui font un bon score au Scrabble ;
  • Adidas qui propose des Runbases dans les grandes villes japonaises où les aficionados du jogging peuvent se changer et prendre une douche ;
  • Kodak qui indique aux touristes les emplacements pour faire de bonnes photos dans les parcs Disney (une idée qu’ils auraient dû reproduire ailleurs) ;
  • IKEA qui propose un hôtel éphémère sur une aire d’autoroute…

L’idée derrière ces services est bien de commencer par plaire aux clients plutôt que de leur matraquer la tête avec de la réclame (“Mes produits sont tellement bien que je vous les vends à -20%“). Je ne peux qu’approuver ce type de démarche, d’autant que les médias sociaux offrent maintenant un formidable levier de visibilité pour ces opérations. Je ne suis pas un spécialiste, mais je pense qu’en prenant 1/10ème du budget d’achat d’espaces publicitaires à la TV, vous avez largement de quoi financer un service en rapport avec votre activité.

Pour les marques à petit budget, il y a également la possibilité de se servir des médias sociaux ou des smartphones pour rendre service (à travers une ou des applications mobiles). Il n’a jamais été aussi intéressant d’exploiter des supports alternatifs pour se démarquer de la concurrence et tenter de conquérir le coeur des clients. Bien évidemment, il y a une priorité à donner à la qualité des produits ou de l’offre, une faiblesse qui ne peut pas être compensée par une application mobile (je m’adresse tout particulièrement aux banques). Réfléchissez-y la prochaine fois que l’on vous proposera une campagne de visibilité reposant sur la répétition d’une promesse publicitaire…

5 commentaires sur “Des marques utilitaires aux marques servicielles

  1. Bonjour Fred,
    encore une fois merci pour cet article ;)
    -> coquille : , “on troue un certain nombre”

    @+

  2. Une marque “outilitaire” : qui répond à un besoin via la mise à disposition d’un outil mais pour les services sans véritable outil, je cherche encore…

  3. Mis à part le fait que la qualité réelle du produit ou du service n’est pas systématiquement liée à son prix, ceci :”cela augmenterait considérablement les prix de vente, donc le pouvoir d’achat” me laisse perplexe. Le pouvoir d’achat de qui ? Si c’est plus cher on peut acheter moins avec le même budget (dans la vraie vie, ce n’est pas parce que les coûts augment que les revenus des acheteurs augmentent eux, en fait pour l’immense majorité des gens c’est même l’inverse) donc il y a une baisse du pouvoir d’achat.

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