Enjeux et opportunités du web-to-store

J’étais ce matin à la présentation d’une étude très complète de Mappy / BVA sur les usages de web-to-store. Véritable marronnier, la concurrence / complémentarité du commerce en ligne sur le commerce de proximité fait couler beaucoup d’encre en ce moment. Le problème est que tout le monde est d’accord pour dire que les activités de vente en et hors ligne doivent être synchronisées et que le trafic de l’un doit alimenter l’autre et vis versa. Soit, mais avec l’étude présentée ce matin, nous disposons de chiffres précis :

  • 63% des Français achètent très régulièrement auprès des commerces de proximité contre 12% seulement sur Internet ;
  • L’achat en ligne se banalise (52% des Français déclarent effectuer au moins un achat par mois) ;
  • 57% des commerçants indépendants n’ont pas de site web et parmi eux, 8 sur 10 n’envisagent pas du tout d’en créer un ;
  • Les commerçants indépendants considèrent à 47% que le relationnel et à 24 % que l’expertise sont les deux attentes principales des consommateurs en magasin, quand voir le produit en réel (61%) et en disposer immédiatement (50%) sont les deux principaux avantages du commerce physique selon les consommateurs ;
  • Les motivations à l’achat en ligne sont principalement le prix (66%) et le gain de temps (52%) ;
  • L’achat en commerce physique concerne 91% des consommateurs pour leurs achats alimentaires, 29% pour les séjours touristiques. A l’inverse, les achats en ligne sont à 67% des consommateurs pour les produits culturels, mais seulement 17% pour le bricolage/jardinage.

Tous ces chiffres sont récapitulés dans deux belles infographies, l’une qui concerne le point de vue des commerçants (“Faut-il avoir peur d’internet ?“) :

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L’autre infographie s’intéresse aux nouveaux acheteurs férus de ROPO (Research Online, Purchase Offline) et de showrooming (repérage en magasin et achat en ligne) :

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Tous les enseignements et réflexions autour de cette étude sont synthétisés dans un livret blanc téléchargeable à cette adresse : Mappy dévoile son Livre Blanc ainsi qu’une étude dédiée au Web-to-Store.

Sinon la conférence de presse a aussi été l’occasion pour les auteurs de l’étude et du livret blanc de débattre de l’ampleur du phénomène web-to-store et de la façon dont les uns et les autres le vivent :

  • Si 40% des commerçants de proximité se sentent menacés, quid des 60% restant ? Sont-ils dans le déni ou est-ce le signe d’un fort besoin d’éducation / sensibilisation ?
  • La compétition pour le référencement est tellement forte que l’ouverture d’une boutique en ligne par un “petit commerçant” n’est pas viable, par contre, ils peuvent s’essayer aux places de marché qui pullulent ;
  • Il y a une forte évolution des comportements des clients qui ne cherchent plus une enseigne, mais un produit, le parcours d’achat s’en trouve irrémédiablement modifié ;
  • Les rentes d’emplacement des commerces de centre-ville s’estompent avec le temps, il faut revenir aux fondamentaux du commerce pour sécuriser sa clientèle (accueil, service, présentation des produits…) ;
  • Les grandes enseignes sont très sensibles aux phénomènes de ROPO et de showrooming, mais tardent encore à modifier leur organisation en conséquence (monter une direction web ou e-commerce ne résout pas le problème) ;
  • Il existe un gros problème de recrutement et de formation des vendeurs qui dégradent la qualité de l’expérience d’achat en magasin (cela ouvre le débat sur la valeur ajoutée des vendeurs) ;
  • L’enjeu des enseignes et distributeurs est de faire percevoir aux internautes la proximité de la relation qu’ils peuvent entretenir et l’encrage locale ;
  • Il y a une grosse contradiction chez les consommateurs qui déplorent la fermeture des commerces de proximité, mais continuent de chasser les prix les plus bas sur le web ;
  • Les consommateurs continueront à marcher dans la rue et rentrer dans les magasins, mais ils seront à la recherche d’une expérience de qualité, d’où la nécessité pour les enseignes de réenchanter les clients avec une présentation impeccable des produits et un service de qualité (comme dans les concepts stores).

C’était donc une matinée très intéressante, mais je déplore le fait que l’on a surtout parlé de coupons de réduction électronique et de campagnes tactiques sur terminaux mobiles pour générer du trafic en magasin. Et le contenu dans tout ça ? Si tous les intervenants étaient d’accord pour dire que le conseil joue un rôle essentiel dans la relation entre les commerçants et les clients, pourquoi ne pas parler du rôle essentiel du contenu dans l’initiation d’une relation qui pourra par la suite être concrétisée en magasin ou en ligne (ou les deux). Ceci est d’autant plus important que le contenu peut prendre différentes formes : le restaurant qui publie belles photos de ses plats sur Instagram, la boutique de déco qui alimente des planches sur Pinterest, l’agence bancaire qui édite un blog pour parler d’épargne, l’agence immobilière qui publie des informations sur l’état du marché d’un quartier précis sur sa page Facebook… Bref, il y a d’innombrables pistes à travailler avant de sortir les bons de réduction.

De même, j’ai pu avoir un bref échange sur Twitter où un de mes lecteurs me faisait remarquer que certains types de commerce comme les boulangers ou les coiffeurs sont à l’abri. Ce à quoi j’ai fait remarqué que l’on peut tout à fait envisager une offre de livraison de croissants ou de pains frais tous les matins sur la base d’un abonnement, et que l’on peut également trouver en ligne de très bons coiffeurs indépendants qui se déplacent à domicile ou au bureau. Je ne le répéterais jamais assez : personne n’est à l’abri. Il ne tient qu’à vous de savoir si vous voulez bénéficier ou subir cette transformation des comportements et attentes.