J’ai participé hier aux premiers États Généraux de l’identité numérique organisés par PRODOPER (un groupe de travail initié par le CNRS), l’AFCDF et l’université Paris Ouest. Ce colloque avait pour objectif d’ouvrir un débat public autour de l’identité numérique (comment protéger sans gêner le développement de l’économie numérique, comment accompagner les changements dans les usages, comment réguler et jusqu’où…) et d’élaborer un livret blanc collectif.
Je n’ai pas pu assister à la journée complète mais j’ai été heureux de pouvoir participer à une table ronde sur les multiples identités numériques. Différents intervenants ont ainsi présenté leurs travaux et réflexions.
Daniel Kaplan de la FING :
- Un groupe de travail en cours à la FING sur l’identité active ;
- La multiplicité des identités numériques peu être vu comme un jeu mais peu également caché une pathologie (schizophrénie ?) ;
- Les transgressions ont toujours existées (ex. paiement en cash dans un sex shop) ;
- Internet nous offre des outils facilitant la diffusion de traces (les médias sociaux), leur recherche (Google) et leur exploitation (Facebook ?) ;
- Différentes raisons poussent un individu à vouloir être visible sur internet : la protection (en cherchant à noyer les traces dans du bruit), la personnalisation (je veux être reconnu), l’aspiration / l’émancipation (cf. l’étude Sociogeek) ;
- Le sujet commence à devenir sérieux avec les e-portfolios (exposition de nos compétences professionnelles et gestion de notre réputation) ;
- Les questions de l’interopérabilité des réseaux sociaux et de la portabilité des données reste entière (cf. Despite New Openness, Facebook Remains Fundamentally Closed) ;
- Il y a encore de l’ambigüité chez certains utilisateurs qui publient à destination d’un cercle restreint mais avec une diffusion libre (notion d’identité clair-obscure).
Yves Deswarte qui est chercheur au LAAS-CNRS en sécurité informatique :
- Ne pas confondre identité et authentification (qui permet de donner des autorisations d’accès / d’édition et surtout permet de tracer les actions) ;
- Travaux de réflexion en cours sur un projet de carte d’identité blanche (les données ne sont délivrées qu’unitairement au travers d’un lecteur dédié) ;
- Un projet très intéressant initié par IBM Zurich sur de la location de voiture anonymisée.
Michel Arnaud qui officie à l’université Paris Ouest Nanterre La Défense :
- Il préconise une approche à 3 niveaux (banque centrale de données / tiers de confiance / Correspondant informatique et Libertés) ;
- Des travaux en cours sur des pseudonymes certifiés ;
- Tout comme la banque centrale lutte contre la fausse monnaie, il devrait y avoir un organisme pour lutter contre les fausses identités ;
- Il existe une application concrète à grande échelle avec le Dossier Médical Partagé Informatisé Personnel (où le N° de sécu est votre identifiant anonyme et où la Caisse des Dépôts joue le rôle de tiers de confiance) ;
- Problème récurrent = comment mettre en place le droit à l’oubli ?
J’ai pour ma part présenter un support sur la fragmentation de l’identité numérique ainsi que sur le rôle clé que vont jouer les terminaux mobiles :
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Ces présentations ont ensuite été suivies d’un débat qui a rapidement dégénéré sur les thèmes de la liberté individuelle et des dérives sécuritaires (caméras de surveillance). Je retiens néanmoins trois réflexions très intéressantes :
- La centralisation des données personnelles sous un seul compte n’est pas la même chose que l’indexation centralisée (sur Google Profile par exemple) ;
- Il est important de ne pas se reposer entièrement sur du numérique et de conserver des supports analogiques pour ne pas sombrer dans le chaos en cas de catastrophe naturelle (plus d’internet, de téléphonie mobile ni d’électricité) ;
- Le droit à l’oubli peut parfois entrer en contradiction avec le devoir de mémoire (notamment pour ceux qui ont publiés des contenus négationnistes).
J’attends maintenant avec impatience la suite des travaux et notamment ce fameux livret blanc collectif.
J’ai pour ma part également participé à ces états généraux. Très instructifs et très nouveaux pour moi. Représentant d’une collectivité territoriale, je participe à la sensibilisation sur les services publics numériques et sur les programmes d’administration électronique, et il y a une certitude : de la gestion de l’identité numérique, on n’en parle pas, si ce n’est au travers de la CNIL. Rien non plus du coté des manifs sur le web 2.0. Un thème à démocratiser très vite comme l’archivage électronique qui sont des sujets connexes.
Bonjour.
Article très intéressant mais j’ai quand même une question. Il y a eu un groupe de travail déjà sur le sujet “YouOnTheWeb” Pourquoi ne pas avoir conjugué vos forces ?
Salut Sylvain,
Tout d’abord, je ne penses pas que cela soit tout à fait le même point de vu, notre e-book était plutôt orienté E-Réputation/Personal Branding.
Et aussi d’un côté, on a comme initiateur une école de commerce à Lille et de l’autre une université Parisienne, c’est le jour et la nuit :D
Il y a aussi un groupe de travail à l’ACSEL (association de l’économie numérique) en charge de l’identité numérique (dont je fais partie).
Entre toutes ces initiatives, l’idée n’est-elle pas de prendre la problématique sous des prismes différents ? Dans notre cas, l’objectif est par exemple de savoir ce qui se fait très concrètement au niveau de divers acteurs internet en terme d’usage, de besoin, de limites. D’autre part nous sommes en train de rédiger un questionnaire afin de recueillir l’avis des utilisateurs internautes sur la question.
Ce qui était assez marquant aux Etats généraux, c’est la question du droit à l’oubli. Finalement, des opinions s’opposent à ce sujet : faut-il permettre l’effacement et quelle portion des informations que les internautes laissent faut-il effacer ? car ces marques laissées sont autant de barrières dont les individus prennent conscience, et qui évitent un laisser-aller de part la prise de parole facile sur Internet.
Merci pour cet article.
Penses tu que l’on pourrait avoir deux comptes sur Facebook. Un vitrine et un autre pour les VRAIS amis ?
Bàt
@ vansnick > Deux comptes Facebook ? Non c’est une hérésie, plutôt deux facettes d’un même compte (qui ne délivrerait pas les mêmes infos). En théorie les options de confidentialités permettent de gérer ça.
/Fred
Bonjour,
Merci Sylvain car c’est vrai l’initiative de YouontheWeb était une réflexion sur l’identité numérique : une journée complète pour co-apprendre, sensibiliser, partager, échanger autour de l’identité numérique. Mais nous avons lancé aussi l’e-book “Cultivez votre identité numérique” (articles de différents experts reconnus).
Je suis toujours étonnée que l’on puisse opposer université et Grande école surtout école de commerce (petit clin d’œil à alex d’e-reputation.org ;-)Ce n’est pas du tout “le jour et la nuit”, la diversité est intéressante et les discussions avec nos collègues d’université prouvent que nous avons des problématiques communes. Ne mettons pas des gens dans des cases !
Comme fab l’indique, les études n’ont peut-être pas le même but, la même problématique de départ. Continuons tous à réfléchir et à échanger ENSEMBLE.
Merci pour ton avis, même si je suis quelque peu sceptique.
Amha, les options de confidentialité de Facebook ne protègent pas assez de ce que tu ne veux pas qui soit public.
Ex: il suffit de répondre à un message et le profil est accessible au correspondant pendant un mois.
Dans la vie les gens ont une vie privée et une vie publique, je ne vois pas comment gérer une frontière entre les deux sur Facebook même avec les options de confidentialité.