Compte-rendu du Digital Marketing Symposium 2012

Ce mardi à Paris, Adobe avait donné rendez-vous à la fine fleur du marketing pour son Digital Marketing Symposium. L’objectif de cette journée était de revisiter le rôle du marketing à l’heure des médias sociaux, de la mobilité et des Big Data. Beaucoup de buzz word qui à être dompté et décrypté.

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De nombreux intervenants se sont donc succédé à la tribune pour donner leur point de vue, partager leurs expériences et présenter des cas d’étude (automobile, distribution, média, entertainment…). Les thématiques centrales de la journée étaient en rapport direct avec la mesure, l’optimisation, la monétisation, la satisfaction… de nombreux sujets qui repoussent toujours plus loin le périmètre d’intervention des responsables marketing (Chief Marketing Officer, CMO).

Comment le digital modifie le marketing ?

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C’est Gregory Pouy qui ouvre la journée avec LA grande question que l’on se pose tous sur l’évolution des métiers du marketing et de la communication :

  • Pour que les clients soient fidèles à une marque, il faudrait que les marques soient fidèles à leurs clients ;
  • Pensez-vous que les consommateurs tournent autour de votre marque ? Nous devrions tous redevenir des commerçants pour nous rapprocher de nos clients ;
  • Le digital n’est pas une révolution, c’est une prise de conscience (les consommateurs ont changé) et un retour aux sources (utilité, proximité, transparence…) ;
  • Les valeurs d’une marque ne sont pas une proclamation, c’est le fil rouge de la relation avec les clients (ex : Coca-Cola = bonheur, Red Bull = courage…) ;
  • Les clients ne veulent plus acheter des marteaux, mais qu’on leur explique comment planter un clou (rendre service) ;
  • “Ne me dites pas que vous êtes drôle, faites-moi rire” (moins de proclamation et plus de démonstrations et d’actions) ;
  • Le digital permet de supprimer des frictions, de transformer plus facilement ses promesses, d’accélérer la transformation des industries ;
  • Une stratégie ne commence pas par les outils et les supports, mais par les valeurs et la promesse ;
  • La frontière entre les campagnes et les équipes en / hors-ligne est encore beaucoup trop marquée chez les annonceurs, les consommateurs ne raisonnent pas de cette façon, ils ne voient qu’une seule enseigne.

Nous sommes tous d’accord pour constater que le marché a beaucoup changé et que l’évolution / l’adaptation est la seule stratégie viable, mais j’aurais aimé avoir une vision plus structurée des facteurs de transformation.

Mythes et légendes du marketing

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Christophe Marée et Julien Nahon passent en revue les travers de la profession :

  1. Créer et gérer des sites web est un enfer” (mises à jour, adaptation aux terminaux mobiles, mesure, montée en charge…). Faux, car les outils ont beaucoup progressé et que les solutions hébergées dans les nuages facilitent grandement l’évolution et l’exploitation.
  2. Les médias sociaux ne servent à rien” (trop complexe, ROI improbable…). Faux : de nombreux outils permettent d’optimiser et d’industrialiser la gestion de l’écoute, de la communication, de l’engagement, de l’analyse /interprétation des données), la valeur d’une présence sur les médias sociaux peut être calculée (évaluée).
  3. Le marketing n’aime pas le Big Data” (trop de sources, des enseignements à faible valeur ajoutée…). Faux : les innovations technologiques permettent de faciliter la collecte, le traitement et la restitution des données.
  4. Le ciblage énerve les clients” (collecte de données personnelles trop intrusives, mécaniques de personnalisation imprécises…). Faux : de nombreuses données sont déjà disponibles pour pouvoir faire un premier niveau de personnalisation et de recommandations, sans forcer les internautes à remplir des formulaires de profilage.
  5. La moitié de votre budget publicitaire ne sert à rien“. Vrai : certains investissements sont plus efficaces que d’autres à cause du contexte, du ciblage… les derniers outils d’analyse et de pilotage permettent d’optimiser les investissements, surtout avec les algorithmes prédictifs.

Comme vous l’aurez compris, cette session était essentiellement tournée sur les outils. Certes, ces outils ne vont pas définir une stratégie à votre place, mais ils vont vous permettre de gagner en efficacité et en simplicité.

La transformation du marketing au service du client

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Amélie Bourgeois-Dagues nous parle de l’évolution du marketing chez Disneyland Paris :

  • La digitalisation transforme le marketing à trois niveaux : connaissance, pertinence et transparence (pour un marketing plus efficace et plus intelligent) ;
  • Les équipes digitale et marketing direct de Disneyland Paris ont été rapprochées il y a 4 ans et fusionnées il y a 2 ans pour avoir une vision intégrée du parcours client (à travers la business intelligence) ;
  • La connaissance client passe par une exploitation rigoureuse des web analytics, avec un focus sur la pédagogie pour bien en expliquer les limites et les contraintes ;
  • Une meilleure connaissance client a un impact immédiat sur la pertinence des contenus, des campagnes, des offres, du timing…
  • L’application mobile du parc a été un levier manifeste de satisfaction des clients (notamment avec les temps d’attente) ;
  • L’audit des conversations sur les médias sociaux mené en 2008 a amené un changement radical dans leur posture publicitaire (montrer les clients et non les produits) et relationnelle (Go Disneyland Paris, le forum officiel) ;
  • Leurs enseignements : un projet de transformation nécessite forcément des alliés et des sponsors, l’adhésion des équipes internes (IT, juridique, finance…), de nouveaux talents, ne pas avoir peur de se tromper ;
  • Il existe de nombreux autres leviers d’innovations qui vont prolonger la transformation du marketing et de l’entreprise (Big Data, objets connectés, social business…).

Il est toujours bon de rappeler que les marques qui s’intéressent réellement à leurs clients performent mieux que les autres.

Le marketing digital à l’ère du cross-canal

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Vincent Levy, le directeur internet de But, nous parle du marketing multicanal :

  • Le pilotage financier par Goldman Sachs a donné un gros coup de boost à l’activité (rénovation de 80% des magasins en 4 ans, orientation e-commerce…) ;
  • Des opérations web intégrées avec un référentiel produit identique à celui des magasins et du CA qui est systématiquement affecté à un magasin (selon zone de chalandise contractuelle) ;
  • Leur stratégie cross-canal repose sur 3 piliers (magasins, web et catalogues / dépliants) ;
  • L’effet ROPO est estimé à 65% chez but (Research Online, Purchase Offline) ;
  • Le magasin doit surprendre (agencement), le catalogue doit inspirer (mise en scène), les dépliants doivent stimuler (offres saisonnières et promos), le site doit permettre de découvrir et approfondir, les mobiles apportent du ciblage et de la praticité (géolocalisation, recherche de disponibilité…), les réseaux sociaux doivent créer de la complicité et de la proximité, les bornes et tablettes en magasins doivent informer, étendre l’offre et optimiser le passage en caisse ;
  • Les différents canaux / outils sont donc parfaitement complémentaires, mais nécessitent de la cohérence (contenus et services) et un objectif commun (génération de trafic en magasin) ;
  • Le cross-canal implique nécessairement le recours à une nouvelle génération d’outils (searchandising, photothèque centralisée, rich média, gestion de campagne…) ;
  • Les outils d’analytics et CRM sont la clé de voute du cross-canal, au service de la connaissance client et du ciblage ;
  • La clé du succès : enlever le “e” de e-commerce et le “digital” du marketing digital, c’est le même client et le marketing doit être au service du commerce.

Très bonne intervention, beaucoup de pragmatisme dans sa vision cross-canal.

L’innovation en matière de marketing digital

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Damien du Chéné de Dailymotion à propos du marketing de l’innovation :

  • Lancement de Dailymotion en 2005 (un mois avant YouTube), un recentrage récent sur les contenus partenaires au détriment des contenus générés par les utilisateurs ;
  • Quelques chiffres : 30 M de vidéos pour 2 MM de visionnage tous les mois ;
  • Innovations = personnalisation (en fonction du profil), applications mobiles (synchronisation hors-ligne), nouveaux formats publicitaires et modalités d’engagement pour les annonceurs (ex : SNCF incivilités et PS Vita).

Intervention sympathique, mais pas vraiment en phase avec la thématique de la journée.

Modéliser les profils visiteurs pour optimiser l’expérience utilisateur

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Disney à propos de la Customer Journey Map :

  • Ils ont fait un travail considérable pour intensifier la collecte de données au travers des web analytics, mais ils avaient du mal à transformer ces données en intelligence (les KPIs ne disent pas tout) ;
  • Web analytics et CRM sont deux disciplines qui poursuivent le même objectif : la connaissance client ;
  • La Customer Journey Map est le livrable qui permet d’unifier ces disciplines et de donner une base de travail pour améliorer l’offre et optimiser les leviers de transformation ;
  • La segmentation ne se fait pas en fonction de critères démographiques, mais de comportements homogènes (recherche de promotions, recherche d’information, préparation d’une visite…) ;
  • L’épluchage des web analytics et de la base CRM a permis à Disneyland Paris de travailler sur le système de navigation, les contenus pour optimiser les parcours client (réduire la complexité, améliorer le taux de transformation…) ;
  • La deuxième étape consiste à personnaliser l’offre et le parcours client en fonction du profil (du segment auquel l’internaute appartient) ;
  • La segmentation n’est pas figée, elle doit être mise à jour régulièrement pour s’adapter aux  comportements qui sont en perpétuelle évolution ;
  • Les données peuvent servir d’indicateurs de performance ET d’enseignements pour ajuster l’offre et le parcours client.

Bien, mais manque de prise de hauteur, car on parle toujours de site web (navigation…) et pas forcément d’expérience client (cf. La conception d’expérience utilisateur est une discipline, pas une notion).

Mise en place et pilotage d’une stratégie sociale

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Jérôme Goldstein de Cdiscount à propos de leur présence sur les médias sociaux :

  • Cross-canal = bénéficier de la résonance hors-ligne (et inversement) ;
  • Le social est la quatrième brique du cross-canal (web + mobile + magasin) ;
  • Les médias sociaux deviennent les nouveaux générateurs de points de contact pour les futurs acheteurs (à considérer comme un lieu de passage) ;
  • Facebook doit être au coeur de votre présence sociale, car c’est là où sont les internautes en masse ;
  • Ils ont lancé une page regroupant l’ensemble des interactions des internautes sur les médias sociaux, avec les actions de leurs amis, les prochains anniversaires et de la recommandation ;
  • Les utilisateurs de Twitter correspondent à une catégorie socio-démographique de niche, de plus, la densité de tweets contraint la marque à sponsoriser ces tweets pour qu’ils ne disparaissent pas trop vite ;
  • Suite au changement de l’algorithme du edge rank, ils ont perdu 40% de taux d’engagement, avec un taux de reach stabilisé à 20-25% ;
  • Facebook n’est pas à considérer comme un levier de business, mais comme un levier de fidélisation voir de recrutement ;
  • Une communauté sur Facebook est une statue de glace, si une publication ne fonctionne pas, cela pénalise le edge rank de la page et met en péril la visibilité globale ;
  • Opération à venir : L’appart que j’aime avec quatre pièces meublées à partir des produits les plus likés sur Facebook ;
  • Une bonne plateforme d’écoute permet de collecter gratuitement de la connaissance client ;
  • Facebook est en train de finaliser un outil de ciblage des membres (Custom Audience) en fonction de leurs centres d’intérêt et de leur comportement.

Un retour d’expérience particulièrement enrichissant sur Facebook et la place dominante que cette plateforme occupe au sein des médias sociaux.

Enjeux et opportunités liés à la transformation du marketing

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Table ronde avec différents intervenants de EDF, ING Direct, L’Oréal et CDiscount :

  • Chez ING Direct, la User Journey est scindée entre PRM et CRM (plus simple de convertir un visiteur en fan qu’en client, même s’ils n’ont pas la même valeur, ils ont un effet bénéfique sur la transformation) ;
  • Chez Cdiscount, ils ont identifié trois leviers pour améliorer l’expérience client : le mobile et notamment les tablettes (couch commerce), la place de marché pour étendre l’offre (ils ont multiplié par 5 le nombre de références produit), le multi-canal avec les 4.000 points de retrait. Il y a un énorme enjeu de mesure et d’analyse sur ces trois leviers, car ils génèrent beaucoup de complexité ;
  • Chez EDF ils souffrent d’un bruit négatif systématique sur les médias sociaux, ils concentrent donc leur budget sur du support et de la réponse aux plaintes / insatisfaction plutôt que sur de la prise de parole institutionnelle ;
  • Chez L’Oréal, le mobile est en train de transformer les parcours client, les médias sociaux influent plus sur la loyauté et la recommandation (advocacy) ;
  • Les données permettent d’optimiser l’offre (par rapport à la concurrence), l’expérience sur le site (personnalisation, recommandations) et sur la fidélisation (connaissance client) ;
  • Les contenus vont devenir un enjeu-clé, les marques vont se scinder en deux : celles qui vont pouvoir monétiser leurs contenus et celles qui seront dépendantes des autres.

Ces témoignages nous permettent donc de conclure cette journée sur l’importance des contenus et surtout des données dans une optique marketing. J’ai pu récupérer un certain nombre d’interviews lors de cette journée avec l’aide d’Olivier Saint-Leger, je les publierais normalement demain en fin de journée dès que le montage aura été finalisé.

Je me laisse encore un jour ou deux pour digérer tous ces points de vue et vous proposer une synthèse de l’évolution du marketing, son rôle et son périmètre d’intervention.

Un commentaire sur “Compte-rendu du Digital Marketing Symposium 2012

  1. J’aurais adoré être présent. Je n’aurais pas pu résister à intervenir et invectiver certains orateurs sur l’énormité de leur propos. Il y a du bon …et du moins bon.
    Retenez simplement :
    Une bonne pub ne transforme pas un produit ou un service. S’il est mauvais, il le restera.
    Une mauvaise relation avec ses clients ne sera pas transformée par le support quel qu’il soit.
    Une promesse non tenue est plus difficile à dépasser.
    Un client mécontent sera 10 fois plus engagé contre vous qu’un client satisfait le sera pour vous.
    Un “like” ne coute rien, n’engage à rien et finalement ne représente pas une vente en fin de journée. Seule les ventes pérennisent l’activité.
    Se donnée une image “Durable” ou “Sociétale” est tellement galvaudé qu’en soit elle n’apporte rien.
    La perte de valeur sur le prix de vos ventes ne sera jamais rattrapée.
    Une différenciation par la réduction de prix envoi tout le commerce dans le mur. Tout comme le mauvaise qualité des produits ou services.
    Le #Fun, #LoL et le #Trash a fait sont temps. C’est rigolo… ou pas, mais cela ne transforme pas les gens en clients.
    L’espionnage sans un consentement réel des consommateurs se retournera contre vous.
    Prendre ses clients pour des billes se paye tôt ou tard.
    Nous avons [collectivement] tué les Communauté de la première génération en y insérant des messages publicitaires. L’internaute n’a plus confiance dans les avis. 1 seul avis ne permet plus de réaliser une vente. N’allons pas tuer à nouveau la Communauté par des pratiques rémunérées similaires.

    Alors vous pouvez faire tout le social que vous voulez. Mais ne le faites pas pour de mauvaises raisons. Qu’apportez-vous réellement à la Société ?
    Sinon, la chute sera terrible et la gueule de bois sera au rendez-vous.

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