L’internet des objets est un domaine qui fait beaucoup fantasmer en ce moment (cf. Mythes et réalités de l’internet des objets), un emballement généralisé que l’on n’avait pas vu depuis de nombreuses années. Si ma mémoire est bonne, le dernier élan d’enthousiasme à grande échelle de ce type remonte aux années 2000 avec l’euphorie autour du CRM. Bref, tout ça pour dire que l’internet des objets est en feu, dans le bon sens du terme. Et comme tout domaine à croissance ultrarapide, un acteur emblématique finit toujours par naturellement sortir du lot pour occuper le devant de la scène (à l’époque du CRM, c’était Siebel). Sauf que… ça fait plusieurs années que la pression monte autour de l’IoT (“Internet of Things“), mais qu’aucun leader ne se profile à l’horizon (cf. cet article publié en 2013 : La bataille des standards nuit-elle à l’adoption de l’internet des objets).
Microsoft étant tombé dans un état léthargique depuis de nombreuses années (décennies ?), le seul acteur d’envergure capable de relever ce défi est logiquement Google. Mais les choses ne sont pas si simples, car ils ont déjà fait plusieurs tentatives, comme le projet Android@Home lancé en 2011 : Google announces Android@Home framework for home automation. Nous en étions restés là jusqu’à ce que les choses prennent une autre tournure avec le rachat surprise de Nest en 2014 : Google se lance dans la course à l’Internet des objets avec le rachat de Nest. Puis il y a eu le lancement d’Android Wear quelques mois plus tard : Google à l’assaut des objets connectés avec Android Wear. Nous sommes maintenant au milieu de l’année 2015 et Android est maintenant une plateforme, à l’instar de Windows, qui se décompose en plusieurs versions : Android, Android Wear, Android TV et Android Auto.
Tout ceci est très intéressant, mais les terminaux alternatifs correspondent à d’autres usages que les objets connectés, et doivent faire face à d’autres contraintes. En d’autres termes : la famille s’agrandit, mais elle ne résout toujours pas le problème d’absence d’acteur dominant dans le domaine de l’internet des objets. C’est là où les annonces faites la semaine dernière à Google I/O rentrent en scène et nous permettent d’apercevoir les contours du plan d’ensemble : Avec Weave et Brillo, Google veut être au centre de l’internet des objets. Les grosses nouveautés présentées lors de cette conférence annuelle relancent Google dans la course à la domination de l’internet des objets :
- Brillo, est donc une version épurée au maximum d’Android, soit un système d’exploitation dédié aux objets connectés, au même titre que AllJoyn de Qualcomm, mBed du consortium ARM ou les projets open source comme Contiki, TinyOS ou ROIT ;
- Weave est un protocole de communication permettant aux objets de communiquer entre eux et d’exécuter un certain nombre de tâches.
Mais ce n’est pas tout, car d’autres annonces viennent compléter le tableau :
- Project Jacquard, un kit de développement transformant les vêtements en surface tactile, notamment grâce à l’insertion d’un fil conducteur dans le tissu et d’une puce qui “traduit” les mouvements de vos doigts (Google ATAP’s Project Jacquard Wants To Weave Sensors Into Your Clothes) ;
- Project Vault, une minuscule puce (grande comme une carte micro SD) qui permet d’authentifier un utilisateur en fonction de la façon dont il manipule un smartphone ou un objet connecté (With Project Vault, Google wants to make you the password).
À partir de ce qui a été annoncé et des produits et services déjà existants, on se rend compte que Google maitrise maintenant la chaîne de bout à bout : la partie matérielle avec Nest et le Project Jacquard, la partie logicielle avec Android et Brillo, la sécurisation avec Project Vault, la communication avec Weave, le traitement des données avec Google Cloud Platform et la restitution avec des applications grand public comme Fit. Au final, ça nous fiat une très belle chaine :
À ma connaissance, il n’existe pas d’autre acteur industriel proposant une palette aussi large de produits et services. Certes, les géants de l’informatique comme IBM, Oracle ou Amazon sont très bien implantés sur le créneau des plateformes de traitement de données (“IoT PaaS” comme disent les spécialistes), mais ils sont absents des deux extrémités de la chaine. Idem pour Apple qui s’illustre avec HomeKit, mais brille par son absence sur les autres créneaux.
En quelques années, et après de nombreuses acquisitions, Google est donc parvenu à effectuer une intégration horizontale, au même titre qu’Apple avec les smartphones. Le but de la manoeuvre étant de capter un maximum de valeur à chacun des maillons de la chaine, et d’élever des barrières à l’entrée en faisant jouer la complémentarité de ces différents produits et services.
Il est encore trop tôt pour dire si Google mérite bien son titre de nouveau roi de l’internet des objets, mais les choses semblent bien parties, car Google a su avancer dans l’ombre et petit à petit placer ses pions aux endroits stratégiques de l’échiquier. La dernière pierre à cet édifice serait de mettre en ligne un site qui expliquerait au grand public cette vision d’ensemble.
Comme beaucoup d’acteurs du webmarketing, vous semblez avoir une vision partielle et erronée de Microsoft. Windows 10 propose une version IoT sur laquelle les applications Windows sont compatibles, Windows 10 intègre AllJoyn, Azure propose du PaaS et du machine learning pour intégrer les données issues de l’IoT, …
L’offre n’est pas au niveau de celle de Google mais bien plus avancée que d’autres que vous citez.
@ Guillaume > Merci pour ces précisions. Y a-t-il un article qui résume la situation et les ambitions de Microsoft ?