Des chatbots au conversational commerce

Je ne sais pas pour vous, mais j’ai l’impression que depuis le mois dernier, tout le monde ne parle plus que des agents conversationnels (“chatbots” en anglais). Il faut dire que le monde du web retient son souffle en attendant les annonces qui vont être faites demain à la Developer Conference de Facebook, et l’attente aura été longue. Pourquoi cette conférence est-elle si importante ? Parce que toutes les conditions sont réunies pour que nous entrions dans l’ère du commerce conversationnel.

Les chatbots sont les nouvelles applications mobiles

À une époque pas si lointaine, les applications mobiles étaient l’eldorado des annonceurs, mais ça, c’était avant. Avant que les coûts de développement et de maintenance des applications natives explosent, avant que les utilisateurs se lassent de cette ribambelle d’applications (près de 2 M disponibles sur les app stores), avant que les services de messagerie prennent une place prépondérante dans nos usages mobiles. Outre l’avènement de ces services de messagerie, nous avons également assisté au développement frénétique de nombreux services de conciergerie et autres assistants personnels (Des services de conciergerie mobiles aux applications transparentes).

Aujourd’hui, la situation est plus confuse que jamais, car le marché s’emballe pour les chatbots, il existe même un incubateur de chatbots (Betaworks’ botcamp wants to give 10 chatbot startups $200k) et un annuaire universel (Botlist). Toute cette agitation doit certainement vous laisser sceptique, pourtant, il est réellement en train de se passer quelque chose, quelque chose de gros (2016 sera l’année du web 3.0). Nous sommes à l’aube d’une nouvelle ère des services informatiques : après les logiciels, les applications en ligne et les applications mobiles, nous allons assister à la généralisation des interfaces conversationnelles.

Le principe est très simple : plutôt que de demander à un utilisateur d’installer un logiciel / une application ou de lui demander de se connecter à un site web, un annonceur va plutôt mettre à disposition un agent conversationnel. “Agent conversationnel” est un terme barbare pour décrire un service accessible à travers une interface textuelle ou vocale. Pour vous y retrouver dans tout ce gros bazar, je vous propose le schéma suivant :

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Dans ce schéma, nous distinguons un certain nombre de points d’entrée où les utilisateurs vont faire des demandes à travers des interfaces vocales ou textuelles. Ces demandes sont interprétées et traitées sur une plateforme dédiée où seront hébergés des robots (qui exécutent des tâches prédéfinies) ou des intelligences artificielles (qui exécutent également des tâches prédéfinies, mais peuvent apprendre par elles-mêmes).

S’il y a autant de bruit en ce moment, c’est que le potentiel est gigantesque. Le marché est d’ailleurs en train de se structurer autour d’acteurs emblématiques. Historiquement, ce sont des services comme Magic ou Operator qui ont démontré la viabilité des interfaces textuelles. Un certain nombre d’applications dédiées similaires se sont rapidement engouffrées dans le créneau comme GoButler, Digit, Pana ou Luka. De même, de nombreux services de conciergerie par SMS se sont développés, notamment en France avec ClacDesDoigts ou HelloJam. Signalons également Prompt, un service qui remet au gout du jour les interfaces à lignes de commande.

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Parallèlement au développement de ces services dans le monde BtoC, les entreprises découvraient Slack et ses nombreux bots (à découvrir dans l’App Directory). D’autres services de messagerie d’entreprise se sont également lancés sur le créneau, et notamment HipChat avec son Bot Lab, Kore et surtout Skype qui a lancé sa plateforme de développement le mois dernier en grande pompe (Microsoft just made a big bet on bots).

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Pour les assistants mobiles, nous retrouvons les interfaces vocales disponibles sur smartphones (Siri d’Apple, Google Now, Cortana de Microsoft) et sur objets connectés (Alexa d’Amazon). Pour le moment, ces assistants sont semi-ouverts dans la mesure où seuls les partenaires peuvent greffer leur service, mais attendez-vous à une ouverture plus large très prochainement, notamment pour limiter la concurrence des nouveaux entrants (Hound, Viv, Sirius…).

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Et pour finir, ces principes de services de conciergerie et assistants personnels ont trouvé leur place au sein des messageries mobiles comme WeChat (ex : WeSecretary), Kik avec son Bot Shop, Telegram avec son Bot Store et bien sûr Facebook Messenger dont la platform sera dévoilée demain.

La ruée vers les bots pour les annonceurs

Si tout le monde s’excite au sujet de la conférence de demain, c’est que Facebook annoncera l’ouverture de son application de messagerie : Facebook pushes businesses to Messenger with new tools for Pages. Tout l’intérêt de lancer un chatbot sur Facebook Messenger est de pouvoir bénéficier de son audience (plus de 900M d’utilisateurs) et de bénéficier d’un environnement technique simplifié.

Plusieurs annonceurs avaient déjà lancé leur bot (Domino’s Pizza, Taco Bell…), mais ils ont dû investir de gros efforts pour mettre au point leur service avant les autres. Sephora s’est également illustré en lançant son bot sur Kik Messenger (Sephora adds glitz to Kik in bet on chatbot commerce), de même que KLM et Voyages-SNCF sur Messenger, mais ils ont certainement dû essayer les plâtres.

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Demain sera un autre jour, car Facebook va démocratiser les chatbots pour les annonceurs, très certainement en s’appuyant sur Parse, leur plateforme d’hébergement d’applications (à confirmer). Les annonceurs bénéficieront également d’une place au sein de l’annuaire intégré, mais également d’un code 2D qui pourra être affiché dans la presse ou en boutique :

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Certes, ça fait un canal de plus à gérer, mais pas forcément dans la mesure où il existe des plateformes de routage pour gérer les flux de message entrant/sortant comme Twilio ou Sinch.

Certes, il faut développer le robot, mais il existe des services pour vous simplifier la tâche comme PandoraBots ou les Français de iAdvize qui se sont récemment repositionnés comme une Conversational Commerce Platform.

Tous les éléments sont donc réunis pour que le commerce conversationnel devienne une réalité : des canaux à forte audience (WeChat, FB Messenger…), des intelligences artificielles dopées au machine learning qui se démocratisent, des solutions technologiques en voie de standardisation (à l’image de AIML), de nombreux prestataires pour faire baisser les prix. Comme on dit chez moi : il n’y a plus qu’à !

La seule réelle inconnue au tableau est de savoir comment Google va se positionner, ou plutôt quelles solutions vont-ils mettre à disposition des développeurs et annonceurs. Je pense notamment à l’ouverture de Google Now et Hangouts en tant que canaux relationnels / commerciaux, l’intégration des chatbots dans sa plateforme d’hébergement d’applications (l’équivalent d’un Bot Engine), l’accélération du déploiement de Jibe, les messages standardisés de nouvelle génération (cf. Avec Jibe, Google prépare la succession du SMS). Il ne reste plus qu’un mois à attendre avant Google I/O, la conférence pour les développeurs de Google.

D’ici là, nous ne sommes pas à l’abri d’une annonce surprise. Je vous donne donc rendez-vous dans les prochains jours pour faire le point…

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