Le Web3 nous est présenté comme une révolution dans l’histoire du web, une authentique disruption capable de défaire le monopole des géants numériques. Si vous êtes un minimum familier avec l’industrie du numérique, alors vous devez très certainement accueillir ces assertions avec scepticisme, car ce n’est pas la première fois qu’on nous fait le coup. Je vous confirme que le Web3 n’a rien de révolutionnaire, car il s’inscrit dans une longue évolution des usages, technologies et pratiques numériques. Cette absence de rupture ne doit néanmoins pas vous faire sous-estimer l’importance des changements que nous sommes en train de vivre.
Les terminaux et usages numériques sont en perpétuelle évolution. Une course au progrès dont nous avons le luxe de profiter, ou pas ! À mesure que le numérique prend une place toujours plus importante dans notre quotidien personnel et professionnel se développe un mécanisme psychologique de méfiance vis-à-vis d’innovations que l’on ne comprend pas ou que l’on ne maitrise plus. Face à des verrous psychologiques renforcés par la peur d’une perte de contrôle des outils de notre quotidien, les entreprises devraient relever les défis de la quatrième révolution industrielle de façon plus sereine en commençant par accompagner leurs salariés dans la découverte de ces nouveaux terminaux / usages et l’acceptation du changement de leurs habitudes.
“This is a revolution“. Qui n’a jamais été envouté par le verbe de Steve Jobs lorsqu’il nous présentait les derniers modèles d’iPhone avec moult superlatifs. Pourtant, à raison d’un nouveau modèle tous les ans, nous nous doutions bien que ces “révolutions” n’en était pas réellement. Ces dernières années, les constructeurs, éditeurs et fournisseurs de services numériques ont adopté des éléments de langage trompeur sur ce qu’est l’innovation et plus généralement les révolutions technologiques. Mais si vous vous intéressez à l’actualité des NTIC, alors vous aurez sans doute remarqué que les révolutions sur lesquelles tout le monde s’extasie en ce moment (deep learning, réalité augmentée / virtuelle, 5G, informatique quantique…) sont en gestation depuis plusieurs décennies et sont très loin d’être maitrisées. La réalité est que les innovations s’inscrivent dans des cycles beaucoup plus longs que l’on veut nous le faire croire.
La semaine dernière j’étais invité par Anthony à la 9e édition des tendances com & digitale du Labcom. L’occasion pour moi d’aborder mon sujet de prédilection, à savoir l’impact du numérique sur les métiers de la communication et du marketing. Plusieurs intervenants se sont succédé pour parler de différentes pratiques (buzz, communication institutionnelle, gestion de la réputation…), mais j’avais la lourde tâche de conclure par un rapide tour d’horizon des dernières tendances du web. “Lourde tâche”, car comme je l’avais expliqué dans mes prédictions de début d’année, les innovations et changements ont été tellement importants ces 2ou 3 dernières années, que le marché ne peut pas en absorber d’autres. Comprenez par là que la croissance n’est pas assez forte pour que des innovations de rupture bouleversent le marché tous les 6 mois. En résumé : nous devons faire avec ce que nous avons.
Certes, les innovations sont nombreuses, mais le rythme est trop élevé, et surtout les entreprises et foyers trop fragiles financièrement pour adopter tout ce que l’on cherche à nous vendre (cf. La quatrième révolution industrielle n’est pas encore là). Ceci étant dit, il faut reconnaitre que nous sommes dans une période un peu folle où toute technologie balbutiante nous est présentée comme la révolution qui va bouleverser le quotidien des consommateurs à court terme. L’impression 3D, les drones, la réalité virtuelle, les véhicules autonomes… sont des domaines très prometteurs, mais qui n’arriveront à maturité que dans de nombreuses années. Bref, le fil rouge de ma présentation était que nous sommes dans une phase de surchauffe et qu’il nous faut prendre du recul.
2015 = l’année des paradoxes digitaux
Plusieurs signaux me font ainsi dire que nous traversons une période critique :
Nous sommes inondés d’un volume toujours plus important de contenus, mais qui véhiculent moins de sens (ex : le succès d’usines à clics comme Buzzfeed, Topito, Taboola ou Outbrain) ou qui sont ultra-courts (Vine) ou éphémères (Snapchat) ;
Les grandes plateformes sociales offrent aux producteurs de contenu un nombre toujours plus important de lecteurs, mais moins de trafic (ex : les contenus natifs qui sont lus directement dans Facebook ou Snapchat Discover) ;
Tous ces signaux mis bout à bout me font dire qu’il est urgent de prendre du recul et de ne pas céder à la précipitation.
De la diversification à l’intégration
Médias sociaux, terminaux mobiles, programmatic buying… sont autant de facteurs d’évolution qui ont complètement transformé le web et les usages liés à l’internet en à peine 5 ans. Une période finalement très courte qui a forcé les annonceurs à diversifier en urgence leurs outils de communication et canaux de recrutement / fidélisation. Une phase de diversification expresse qui a finalement fragilisé les annonceurs en dispersant leurs ressources (budget, équipes…). Maintenant que tous les “coups tactiques” ont été tentés, je suis convaincu qu’il est temps de mettre un terme à toutes ces fuites en avant opportunistes et de se concentrer à nouveau sur les clients. Car non, ce n’est pas en lançant une opération de stealth marketing sur Meerkat ou en développant un prototype pour l’Oculus Rift que l’on place le client au centre, c’est plutôt l’inverse.
Remettre le client au centre de l’entreprise, ça veut dire prendre en compte l’évolution de ses besoins, contraintes et comportements dans un quotidien où le numérique et le smartphone occupent une place considérable. Ça signifie également revoir les processus internes pour améliorer l’efficacité et adapter le modèle économique à une nouvelle réalité (la désintermédiation à outrance). Mener tous ces changements de façon simultanée est un chantier gigantesque qui nécessite l’implication de l’ensemble des métiers internes et surtout qui requiert la mise en place d’une feuille de route précise pour éviter de nouvelles dispersions.
Il y a quelques années, j’avais publié un article décrivant la façon dont les disciplines du web sont liées entre elles. Je reste dans le même état d’esprit avec le schéma suivant :
Il y a plusieurs niveaux de lecture pour ce diagramme :
Les clients doivent être au centre des préoccupations, des processus et des opérations (pas les fans, les followers ou les “influenceurs”) ;
On n’oppose pas brand content et brand utility, les contenus permettent d’augmenter la visibilité, de recruter des utilisateurs de services qui vont générer des données permettant d’améliorer les contenus et services ;
Ces contenus / services / données sont diffusés indifféremment sur le web, les médias sociaux, les terminaux mobiles ou objets connectés ;
Ces supports et canaux sont exploités par l’ensemble des services pour améliorer la connaissance client, la réputation et l’image de marque, la transformation, la satisfaction, la fidélisation…
Comme vous l’aurez compris, le mot d’ordre est “intégration” : intégrer le web et le numérique à tous les étages et dans tous les services. Oui, c’est bien de transformation digitale dont nous sommes en train de parler : définir une feuille de route commune pour l’ensemble des métiers internes, où le numérique a une place prépondérante, afin de mieux correspondre à la réalité du quotidien des clients et prospects (cf. De l’Entreprise 2.0 à la transformation digitale).
J’ai bien conscience de ne pas vous révéler grand-chose avec ce discours consensuel (tous les métiers travaillant ensemble), mais il me tient à coeur de recentrer le débat sur les clients et de bien prendre conscience des dérives en cours.
J’ai participé hier à une nouvelle édition des Social Drinkup, des rencontres régulières pour partager les expériences des uns et des autres sur le marketing numérique et les évolutions dans ce secteur. Le thème de la soirée portait sur l’innovation et la façon de la stimuler et mettre en oeuvre. Dans ce cadre, j’ai pu faire une rapide intervention sur le panorama des innovations. L’objectif de cette présentation était de faire le point sur tout ce dont on entend parler ces derniers mois, il y en a beaucoup, comme le prouve le Hype Cycle for Emerging Technologies du Gartner. Je ne vous cache pas mon agacement quant aux discours très optimistes des uns et des autres qui nous annoncent tous l’avènement de la quatrième révolution industrielle grâce aux objets connectés, à NFC, à l’impression 3D, à la réalité augmentée, aux agents intelligents… Bref, cette cacophonie ambiante m’exaspère, aussi j’ai essayé de tout rationaliser.
Cartographie des innovations technologiques
Le schéma ci-dessus répertorie les différentes innovations et les classe dans cinq grands domaines : interfaces 3D, IHM innovantes, intelligences artificielles, interactions locales et Internet des objets. Certaines innovations sont liées, à l’image des balises de proximité qui exploitent la norme Bluetooth 4.0. Toutes ces innovations ne sont par contre pas forcément pertinentes pour vous. Il est ainsi possible de filtrer ce panorama en fonction de vos objectifs (augmenter les ventes, améliorer la connaissance client, fidéliser, rendre service…).
De même, toutes ces nouvelles technologies n’en sont pas au même stade de développement. J’ai donc dévoilé hier soir une grille d’analyse permettant de comparer le potentiel disruptif de ces innovations en fonction de quatre critères : l’appétence du marché, l’intérêt pour les marques, la facilité d’apprentissage et la facilité de mise en oeuvre. Le système de notes est purement empirique, il a été fait à partir de mes observations, lectures et de conversations que j’ai pu avoir avec différents spécialistes.
Comparatif empirique des innovations technologiques
Enfin, je me suis interrogé sur la viabilité de ces innovations en fonction de trois critères : la maturité des technologies employées, l’existence de standards et la présence ou non d’acteurs industriels pour soutenir telle ou telle innovation.
Évaluation de la viabilité des innovations technologiques
Avec ces deux grilles d’analyse, vous avez des premiers éléments de réponse pour y voir plus clair et faire le tri dans ces innovations. Car l’important est de prendre du recul et d’évaluer l’impact que ces nouvelles technologies peuvent avoir sur le parcours client (en quoi est-ce qu’elles le modifient ? Comment les exploiter pour multiplier les points de contact) et sur l’expérience utilisateur (lors des phases d’achat, de possession ou de renouvellement).
Donc au final, le mot d’ordre est de ne pas se précipiter pour tester telle ou telle nouvelle technologie, car elles ne sont pas encore stables, et car cela ne présente pas forcément un intérêt pour votre marque. Entendons-nous bien : je ne minimise en rien ces innovations, j’essaye simplement de vous expliquer que nous ne sommes vraisemblablement pas à la veille de la quatrième révolution industrielle : tout ce qui est cité plus haut est lié à un usage plus intensif de l’outil informatique. Nous sommes donc encore en train de vivre la troisième révolution industrielle. Je ne suis pas futurologue, mais j’estime que les conditions ne sont pas encore réunies pour annoncer un réel paradigme de l’industrie. Pour cela, attendons de voir comment progresse la science sur des matériaux révolutionnaires comme le graphène, ou des sujets de pointe comme l’informatique quantique ou l’informatique moléculaire.
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