Les interfaces naturelles d’aujourd’hui et de demain

J’ai déjà eu l’occasion de vous parler de l’évolution de l’outil informatique vers des terminaux polymorphes et nomades. Cette évolution du hardware se fera de concert avec le software et notamment les systèmes d’exploitation et les logiciels. D’ailleurs nous sommes en plein dedans avec la vague des widgets (sorte de mini-applications) qui font la fortune d’Apple sur l’iPhone et le prochain Chrome OS de Google qui sera un hybride entre navigateur et système d’exploitation.

Les interfaces naturelles bientôt dans notre quotidien

Depuis que j’ai assisté au speech très inspiré de Bill Buxton sur les interfaces naturelles, je m’interroge sur la pertinence du modèle écran / clavier / souris. Regardez de près le Project Gustav pour vous rendre compte du potentiel que pourrait représenter des interfaces faisant une utilisation optimale des écrans tactiles et des périphériques naturels (ici un simili-pinceau pour cette simulation de peinture) :

L'interface du Gustav Project
L'interface du Gustav Project

La prise en main est immédiate et l’utilisateur s’exprime d’autant mieux qu’il utilise les gestes et outils de son quotidien. Démonstration vidéo ici :

Ce type d’interface a d’ailleurs été vu sur les stands de Fiat et de Renault au récent Salon de Genève pour épater les visiteurs : Les configurateurs interactifs de Fiat et Renault au Salon de l’Auto de Genève.

Le configurateur ludique de Fiat au Salon de Genève
Le configurateur ludique de Fiat au Salon de Genève

La dimension ludique est ici évidente et l’on se met à rêver des nombreuses possibilités offertes par des terminaux comme Surface… ou comme la Sphere, un autre projet de Microsoft qui combine un affichage sphérique et une surface tactile :

Le projet Sphere de Microsoft
Le projet Sphere de Microsoft

Mais pas la peine de sortir la grosse artillerie pour proposer une expérience différenciante. Exemple avec le Gesture Cube, un concept à mi-chemin entre touchbook et cadre numérique qui pousse encore plus loin la logique de terminal domestique connecté popularisée par le Chumby : Gesture Cube, Une interface 3D interactive.

Le concept de Gesture Cube
Le concept de Gesture Cube

Là encore, ce cube domestique aux formes et dimensions très proches d’un radio-reveil, exploite parfaitement les gestes naturels et surtout la contextualisation des informations / applications en fonction de la pièce dans laquelle vous vous trouvez :

Et dans la série “je fais du neuf avec du vieux“, je me permets également d’évoquer le concept Waveface Ultra proposé par Asus, un écran tactile souple que vous enroulez autour de votre poignet :

Le concept Waveface d'Asus
Le concept Waveface d'Asus

L’idée ici n’est pas de miniaturiser un smartphone mais plutôt de faire monter en compétence votre montre pour qu’elle puisse vous envoyer des notifications et qu’elle interagisse avec ce qui vous entoure :

Là encore vous remarquerez que le terminal et les gestes utilisés pour le manipuler sont les plus naturels possibles (l’interface est ici presque transparente).

Dernier exemple et pas des moindres avec SixthSens le concept d’interface gestuelle portable présentée par Pranav Mistry lors du dernier TED : An interview with Pranav Mistry, the genius behind Sixth Sense.

SithSens, l'interface gestuelle portable
SithSens, l'interface gestuelle portable

Imaginez-vous avec un terminal en forme de médaillon qui serait équipé d’un mini-projecteur (pour afficher des informations) et d’une caméra pour capter le mouvement de vos doigts. Lorsque vous allumez le terminal, vous choisissez une application et celui-ci projette alors une interface adaptée au contexte d’utilisation (ici, la lecture d’une vidéo en complément d’un article) :

L'interface gestuelle SixthSens en action
L'interface gestuelle SixthSens en action

Pour le moment le terminal en lui-même est rudimentaire mais l’on décèle un potentiel énorme dans la vidéo suivante :

Et comme dans les précédents exemples, c’est un objet du quotidien (un médaillon) qui est mis en scène dans notre quotidien (prendre une photo, lire un journal) et dont l’interface se manipule de façon tout à fait naturelle (avec les doigts).

Interfaces naturelles et jeu vidéo, une réalité

Bon nous sommes tous d’accord pour dire que ce n’est pas demain la veille où nous sortirons avec notre médaillon augmenté, il n’empêche que les interfaces naturelles sont une réalité pour un grand nombre de personnes (vous avez déjà essayé la Wii ?) et qu’il n’y a aucune raison pour que l’industrie du jeu vidéo n’aille pas plus loin (d’ailleurs elle a toujours été très précurseur).

La Wiimote pour reproduire les gestes naturels
La Wiimote pour reproduire les gestes naturels

Passé relativement inaperçu l’année dernière, le jeu EndWar est ainsi un bel exemple d’interface naturelle avec son principe de commandes vocales plutôt abouti :

L'interface à commandes vocales du jeu EndWar
L'interface à commandes vocales du jeu EndWar

Commandes gestuelles, commandes vocales, c’est la sortie en juin prochain de la déclinaison grand public du Project Natal de Microsoft qui devrait normalement rehausser la barre d’un cran avec des concepts de jeu tout à fait renversants. Exemple avec ce concept malheureusement abandonné de beat them all qui se joue avec les doigts : Indie studio reveals cancelled, finger-powered Natal game.

Un projet de jeu de combat avec les doigts
Un projet de jeu de combat avec les doigts

Quel dommage que ce concept n’ai pas été retenu car je me voyais tout à fait jouer avec mes doigts sur la table basse :

Illustration du jeu 2 Finger Heroes
Illustration du jeu 2 Finger Heroes

Bref, j’ai comme l’impression que les souris et claviers vont prendre une grosse claque avec la généralisation des écrans tactiles et des interfaces naturelles. Quoique…

Pas d’interfaces naturelles dans le milieu professionnel ?

Outre les métiers graphiques, j’ai du mal à anticiper une percée des interfaces naturelles dans le monde professionnel. Autant je suis convaincu du potentiel ludique et intuitif de ce type d’interfaces, autant je ne pense pas que l’on puisse améliorer la productivité d’un utilisateur de clavier / souris dans un contexte pro.

C’est donc malheureusement l’argument économique qui va pérenniser l’outil informatique tel que nous le connaissons sur le poste de travail. Rien de dramatique dans la mesure où nous pourrons toujours exploiter des interface naturelles dans nos moments de détente ou à la maison. La rupture entre le monde pro et perso sera ainsi d’autant plus nette et agréable.

Et le web dans tout ça ?

Reste une grande inconnue pour les interfaces naturelles : Comment les exploiter dans le cadre d’un navigateur web ? Et c’est là où nous nous heurtons au casse tête des interfaces web qui se manipulent à la fois avec la souris pour le clic ou le drag & drop (donc potentiellement la main ou le doigt), mais également avec le clavier pour saisir une URL ou remplir un formulaire.

Donc très clairement sur ce cas d’usage particulier je suis incapable de prendre position. Comme je fais un usage intensif du web, je penche tout de même en faveur du traditionnel couple clavier / souris. Mais tout ceci pourrait bien changer avec la “widgetisation” des sites web et services en ligne sur l’iPhone et encore plus sur l’iPad.

Affaire à suivre, nous aurons l’occasion d’en reparler.

10/GUI réinvente le pavé tactile pour remplacer la souris

Depuis le début de la semaine on peut voir tourner une vidéo énigmatique sur un concept révolutionnaire de pavé tactile géant multi-touch qui viendrait remplacer la souris. Remplacer la souris ? Oui tout à fait, car il faut dire qu’en presque 40 ans la souris n’a pas beaucoup évoluée, tout au plus lui a-t-on retiré son fil, sa boule et lui a-t-on rajouté quelques boutons et une molette. Mais j’ai comme l’impression qu’avec le succès de l’iPhone et la généralisation prochaine des terminaux multi-touch, cette dernière va bientôt se retrouver en pré-retraite. À moins qu’Apple et Microsoft ne parviennent à lui donner une seconde vie (cf. Apple to Ship Multitouch Mice With New iMacs Soon et Microsoft Research shows off multitouch mouse prototypes).

Toujours est-il qu’un certain Clayton Miller a décidé de révolutionner notre façon d’interagir avec les ordinateurs en proposant ce concept remarquable  : 10/GUI.

http://vimeo.com/moogaloop.swf?clip_id=6712657&server=vimeo.com&show_title=1&show_byline=1&show_portrait=0&color=00ADEF&fullscreen=1

La base de sa réflexion est de dire que les terminaux multi-touch qui vont arriver sur le marché posent des problèmes ergonomiques en créant des tensions au niveau du bras (pour un écran sur pied) ou du coup (pour un touchbook) :

10GUI_1

Son approche est de remplacer la souris par un gigantesque pavé tactile multi-touch :

10GUI_2

Vous noterez au passage que cette idée de grande zone tactile n’est pas neuve puisqu’on la retrouve notamment sur les palettes graphiques Bamboo de Wacom ou sur l’OLPC :

olpc

Petite différence par rapport aux autres pavés, il propose de remplacer les deux boutons par deux zones de chaque côté :

10GUI_3

Mais sa réflexion ne s’arrête pas là car il propose également d’adapter l’écran de travail (le bureau) à cette nouvelle interface en abandonnant le système de fenêtres multiples qui flottent au profit de fenêtre alignées dans une grande frise à mi-chemin entre l’Exposé de Mac OS et le alt+tab :

10GUI_4

Le bureau ressemble donc à un bureau “traditionnel” avec ses widgets, mais la grande nouveauté vient de l’affichage des doigts à l’aide d’un senseur de proximité qui détecte ces derniers lorsqu’ils sont juste au-dessus du pavé (ici l’utilisateur fait un clic avec son auriculaire) :

10GUI_5

Un clic du doigt sur la zone tactile à droite fait apparaitre le menu des applications et des services (search) :

10GUI_6

En cliquant sur la zone de gauche vous accédez aux fonctions de l’application active (ici un traitement de texte) :

10GUI_8

La manipulation des fenêtres et objets se fait à l’aide de combinaisons : deux doigts pour manipuler un objet dans une application, trois doigts pour basculer d’une application à une autre et quatre doigts pour minimiser les fenêtres d’application et accéder à la fameuse frise :

10GUI_7

En pinçant vos doigts vous réduisez la taille des fenêtres et pouvez accédez à une vue d’ensemble où les fenêtres sont regroupées par application (si plusieurs documents sont ouverts en même temps) et sont illustrées avec des pictos :

10GUI_9

Rien à redire, ce système est redoutable. Même si cela peut vous paraitre déroutant d’abandonner votre souris, imaginez ce périphérique comme un pavé tactile de nouvelle génération :

10GUI_10

Même si ce produit n’existe que sous forme conceptuelle, il faut bien admettre que le concept est très poussé qui pourrait aller de paire avec les bureaux 3D et pourquoi pas les interfaces en relief.

Plus sérieusement je pense que ce concept préfigure ce qu’Apple risque bien de nous sortir avec sa futur MacTablet (cf. Why Apple’s Tablet Will Rock).

Alors, ça vous tente ?

HTML 5 + CSS 3 = une révolution pour les interfaces web

Voilà 20 ans que le web existe et presque 10 ans que le HTML n’a pas évolué et propose toujours la même structure et les mêmes balises. 10 ans c’est beaucoup, c’est la moitié de la “vie” du web. 10 ans c’est beaucoup, surtout lorsque l’on constate les révolutions qui ont eu lieu dans les usages du web ces 5 dernières années (partage de vidéos, réseaux sociaux, infos en temps réel…). Pas étonnant que des technologies propriétaires (Flash) se soient imposées (notamment sur la vidéo et les RIA) et que d’autres s’installent tranquillement pour combler un manque (notamment Google Gears pour l’accès hors ligne).

Bref, il était temps que le marché se réveille et c’est (presque) chose faite avec l’arrivée à maturation de HTML 5 et CSS 3. Pour faire simple, disons que nous avons franchi le point de bascule et que la route qui mène à une adoption de ces nouveaux standards n’est plus si longue. Pourquoi est-ce important de se soucier de ça ? Tout simplement parce que ces nouvelles spécifications vont changer beaucoup de choses dans la façon de concevoir et d’exploiter les interfaces web, des changements qui vont fortement impacter les différents métiers de la profession.

Autant vous prévenir tout de suite : les explications qui vont suivre sont une tentative de l’auteur de résumer et vulgariser un foutoir pas possible (qui provoquent d’innombrables querelles d’experts depuis des années : HTML 5 is a mess. Now what?) sans pour autant prendre partie car de toute façon les choses semblent visiblement s’améliorer. Je ne donne que mon interprétation, vous êtes libre de proposer la votre.

Commençons donc par nous intéresser à cette nouvelle version de HTML et pourquoi s’est-elle imposée face à XHTML (pour une explication plus détaillée c’est ici : XHTML 2 vs. HTML 5, et là : Misunderstanding Markup: XHTML 2/HTML 5 Comic Strip).

HTML vs. XHTML

Au commencement il y avait donc le HTML 4 dont les spécifications ont été publiées en 1997. Une légère évolution a été publiée en 1999 avec le HTML 4.01. Puis le W3C a décidé de miser sur le langage XML (plus sophistiqué et surtout extensible) en proposant une reformulation du HTML avec les balises du XML, à savoir le XHTML 1.0. Tout l’intérêt de cette reformulation est de pouvoir marier la simplicité du HTML avec la puissance du XML (et ses nombreuses possibilités d’évolution).

Sur cette lancée, le W3C a alors lancé le chantier XHTML 2 pour faire une réécriture complète des spécifications et poser de nouvelles bases pour un langage plus puissant, plus robuste, plus évolutif… bref, un langage qui propulserait le web dans une autre dimension sans toutefois assurer de rétro-compatibilité. Hé oui… car il faut bien faire table rase pour pouvoir redémarrer sur des bases saines. Et c’est bien là le problème : ne pas assurer la rétro-compatibilité était inacceptable pour l’industrie (et notamment les éditeurs de navigateurs) qui ont alors décidé de lancer des travaux indépendant sous l’aile du WHATWG (Web Hypertext Application Technology Working Group). Ce groupe de travail a commencé à travailler sur les spécifications des Web Applications.

Après un bras de fer de plusieurs années (et un constat d’échec pour l’équipe de travail sur les spécifications XHTML 2), le W3C a fini par réintroduire les spécifications du WHATWG et de créer un groupe de travail officiel sur le HTML 5 tout en abandonnant l’autre chantier (RIP XHTML 2).

Par élimination il ne reste donc plus qu’un seul prétendant au titre de remplaçant du HTML 4, d’autant plus qu’il a reçu le soutien de qui vous savez (Google Bets Big on HTML 5). Nous sommes donc semble-t-il arriver à un consensus de l’industrie sur des spécifications qui ne sont pas aussi ambitieuses que celles d’XHTML 2 mais qui ont l’énorme mérite de faire avancer les choses (souvenez vous qu’il n’y a pas eu d’évolution en 12 ans).

Qu’est-ce qui va changer avec HTML 5 ?

Pour faire simple disons qu’avec HTML 5 nous allons quitter l’ère du web des documents pour enter dans celle du web des applications. L’ambition de cette nouvelle itération est donc de supprimer les balises obsolètes, d’en remplacer certaines et d’en introduire de nouvelles afin de donner une structure sémantique plus cohérente aux pages web.

De nouvelles API vont ainsi standardiser un certain nombre d’interactions :

  • L’accès hors ligne et le stockage sur le disque dur (pour une exploitation en mode déconnecté) ;
  • L’édition en ligne, le drag&drop ;
  • L’accès à l’historique de navigation…

Bref, tout ce qui nécessitait le recours à javascript ou à des technologies propriétaires sera désormais “livré d’origine”.

La grosse nouveauté est donc de proposer un nouveau schéma de structuration des données qui va venir remplacer les éléments en bloc et en ligne (cf. HTML5 se dévoile) :

content_model

Les spécifications manquent de précisions pour se faire une idée de ce nouveau schéma, d’autant plus que de nouvelles balises structurantes comme <template> et <datatemplate> ont été introduites.

Gros changement également avec un jeu de nouvelles balises permettant de mieux définir le contenu : <header>, <nav>, <article>, <aside> et <footer> :

html5_structure

C’est donc une petite révolution puisque ces nouvelles balises vont permettre une structuration beaucoup plus propre des pages, surtout pour les sites avec beaucoup de contenus (blogs, portails…). Plus d’infos ici : HTML5 and The Future of the Web.

Notons enfin l’apparition de balises très intéressantes comme <audio> et <video> pour les éléments multimédias, <canvas> pour les dessins vectoriels ou encore <datagrid> pour les tableaux de données. Ces nouvelles balises permettront de réduire la dépendance à des technologies propriétaires comme Flash. Juste un dernier mot sur les formulaires qui vont avoir de nouveau types de champs <input> comme date, time, number, range, email, url, search, color

Je pense qu’il n’est pas faux de dire qu’avec HTML 5 la séparation entre contenu, structure et présentation sera encore plus facilement gérable.

Quelles nouvelles possibilités pour CSS 3 ?

Précisions que du côté des feuilles de styles, les travaux autour des nouvelles spécifications CSS 3 sont beaucoup moins perturbés. Cela permet donc d’avancer plus vite. Quoi que… j’ai dans mes archives des articles sur le sujet datant de 2004 et 2005 : Des formulaires standardisés, CSS 3 : des templates pour structurer vos pages web et Formulaires : quand les CSS 3 vous changent la vie.

L’essentiel des travaux autour des CSS 3 a été de standardiser des propriétés pour réaliser des traitements graphiques qui nécessitaient auparavant des astuces :

  • Border-radius pour les coins arrondis ;
  • Text-shadow pour les ombres portées ;
  • Transparency et Opacity pour la transparance ;
  • Animation et Transition pour les animations (cf. Nicer Navigation with CSS Transitions, à regarder avec les dernières versions de Safari ou Chrome)…

Bref, il y a beaucoup de nouveautés à découvrir ici : 7 New Essential CSS 3 Techniques Revealed. Tout l’intérêt étant de pouvoir se passer d’images ou d’astuces pour pouvoir réaliser ce que l’on souhaite. Illustration avec ces jolis boutons :

Boutons_CSS3

Encore plus intéressant, toutes les propriétés concernant la mise en page et le positionnement : Presentation Levels, Template Layout, Multi-column Layout, Grid Positioning et Flexible Box Layout.

Le changement va être aussi spectaculaire que radical : là où il fallait tout un tas de <div> imbriqués, d’images, de tableaux… pour arriver à la mise en page et au traitement graphique souhaité (donc en alourdissant le code source), nous aurons bientôt une syntaxe bien plus lisible grâce à ces nouvelles propriétés.

Quels bénéfices et pour quand ?

Je vous propose de récapituler ce que nous venons de voir : un contenu mieux structuré et défini, une syntaxe allégée, des traitements graphiques standardisés… tout ceci va permettre d’avoir un code source beaucoup plus propre. Ceci est particulièrement important dans la mesure où les pages ne sont plus faites à la main pour des utilisateurs humains, mais générées par des systèmes de gestion de contenu et exploitées à la fois par des humains et des agents intelligents (via les balises descriptives ou microformats).

C’est donc une authentique révolution à laquelle nous allons assister… dans quelques années ! Hé oui, car même si les spécifications sont là, leur implémentation est fonction du bon vouloir des éditeurs de navigateurs et du taux de renouvellement par les utilisateurs.

Aujourd’hui le marché est encore dominé par un IE qui risque d’aggraver encore son retard avec ces nouvelles spécifications. Vient ensuite Firefox qui évolue vite (grâce à une communauté très active) mais qui est tout de même fortement ralenti par l’inertie des utilisateurs (surtout lorsque les parts de marché dépassent les 30 %).

Il est certain que les choses sont beaucoup plus simples pour Safari, Opera ou encore Chrome qui peuvent avancer à leur rythme (lire à ce sujet : Opera 10, Chrome 4, Firefox 4 : Vers des plateformes sociales et applicatives).

Donc au final, l’impact ne se fera pas ressentir avant quelques années. Sauf si un éditeur trouve le moyen de faire avancer les choses au forcing (au hasard Google avec son futur Wave qui tournera bien mieux sur Chrome).

google-wave

Par contre, une fois que le parc de navigateurs aura été renouvelé, j’anticipe un gros changement au niveau de l’industrie du web avec une montée en puissance de profils comme les architectes front office (l’équivalent des DBA ou des architectes systèmes) chargés de concevoir des interfaces web cohérentes et surtout performantes (notamment dans la gestion des styles).

De même, j’anticipe une véritable révolution pour les outils de prototypage rapide dont l’intérêt était limité du fait du format de sortie (du HTML de base que ne pouvaient pas exploiter les équipes de production) et qui vont fortement bénéficier de cette épuration du code source et de la séparation structure / contenu /présentation.

Bref, j’ai l’impression de me répéter, le web a de très beaux jours devant lui avec ces nouvelles spécifications qui vont tranquillement nous amener vers des contenus mieux structurés (sémantisés) et des applications en ligne plus performantes et simples à créer / maintenir.

Netbook + TabletPC = Touchbook (et le web devient tactile)

Alors que le marché des netbooks n’en finit plus de grossir (ils représentent maintenant 1/5 des ventes : Netbooks Now A Fifth Of All Portable Computer Shipments), j’ai comme l’impression que nous sommes en train de voir émerger un nouveau segment : les touchbooks (des netbooks à écran tactile). Certains pourraient dire que les Tablet-PC existent depuis de nombreuses années, certes, mais je pense que ce type de terminaux va connaitre une seconde jeunesse en bénéficiant de l’expérience acquise par les constructeurs sur les netbooks (des machines “low-cost“). Entendons-nous bien : “low-cost” ne rime pas forcément avec mauvaise qualité, il s’agit plus d’un positionnement différent où l’on ne recherche pas les meilleures performances mais plutôt le meilleur rapport valeur/prix (cf. The Good Enough Revolution: When Cheap and Simple Is Just Fine).

En tête de liste des prétendants à ce nouveau segment nous avons le Tabbee d’Orange :

tabbee

 

À peine sortie, cette machine fait déjà des émules avec le JournE Touch de Toshiba :

Journe_Touch

 

Nous retrouvons ensuite le fameux CrunchPad qui devrait sortir d’ici peu :

crunchpad

 

Moins sexy mais bien meilleur marché il y a le TouchBook de Always Innovating qui est proposé en open source pour le software ET le hardware (merci à Piffeur pour le lien) :

touchbook_AI

 

Mais on trouve également des formats alternatifs comme les Internet Tablet d’Archos :

archos-a5h-android

 

Ou encore les netbooks à écran tactiles comme le T91 d’Asus :

EeePCT91

 

Le point commun de toutes ces machines est de proposer un écran tactile, mais pas forcément l’interface qui va avec ! Et c’est là où il y a comme un problème, alors que le segment des netbooks est encore en train de chercher le bon système d’exploitation (cf. Intel et Jolicloud à la recherche de l’interface parfaite pour les netbooks).

Apple a révolutionné la téléphonie mobile avec son iPhone, les constructeurs précités sauront-ils en faire de même avec ces nouvelles machines ? Difficile à dire pour le moment, surtout avec le lobbying de Microsoft et de son futur Windows 7 qui devrait proposer des choses très intéressantes en terme d’interfaces tactiles. Intéressantes pour une utilisation intensive voire exclusive ? J’en doute, mais je peux me tromper. Archos montre l’exemple en proposant des Internet Tablet propulsée par Android mais est-ce suffisant pour convaincre le grand public… pas certain non plus car cela limite les domaines d’applications.

Dans l’idéal il faudrait attendre l’annonce d’un Macbook Touch pour avoir une machine cohérente (avec une interface parfaitement adaptée) mais ça ne sera visiblement pas pour cette année.

apple_netbook

Pour le moment le produit qui me semble le plus intéressant est le Qooq, un terminal dédié à la cuisine :

qooq

Pour faire simple, il s’agit d’un touchbook entièrement dédié à la cuisine (un “coach culinaire”) avec tout un tas de recettes à suivre pas à pas, des vidéos de préparation, des astuces et interviews de grands chefs et même une application de gestion des courses. Bref, c’est un terminal “intégré”.

Vous noterez qu’un effort a été fait pour adapter le terminal à son contexte d’utilisation (écran protégé contre les projections, pied pour le maintenir en position verticale…) de même que l’interface particulièrement réussie. Cette machine est proposée avec un abonnement (13 €/mois) qui donne accès aux recettes, aux fiches ingrédients ainsi qu’à un magazine vidéo sur l’art culinaire. Un modèle économique particulièrement intéressant pour un terminal proposé à 350 € (il fait aussi station météo et cadre numérique).

Peut-être que le Qooq ouvre la voix à toute une série de touchbooks de niche avec une ergonomie, une interface et des services verticalisés pour le grand public (pour les personnes âgées, pour les 5-7 ans…) ou les professionnels. En tous cas je me réjouis d’avance car ce type de machine va permettre de remettre en question les interfaces jusqu’alors proposées et apporter de l’innovation dans un marché stagnant (à quand remonte la dernière grosse innovation en matière d’informatique grand public ?).

Si vous connaissez d’autres exemples, les commentaires sont là pour ça…

Intel et Jolicloud à la recherche de l’interface parfaite pour les netbooks

J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer au sujet des netbooks et du rôle qu’ils vont jouer dans l’émergence de nouveaux usages (cf. Les netbooks vont-ils amorcer la révolution du web 3.0 ?). Voilà maintenant plus d’un an qu’Asus a révolutionné le monde de l’informatique en lançant le premier netbook (le EeePC 700). Depuis nous assistons à une course de vitesse entre les constructeurs (Asus, Acer, HP, Samsung…) pour grignoter un maximum de parts de marché sur un segment à très forte croissance (cf. Croissance fulgurante pour le netbook en 2008).

Et pourtant, aussi forte que soient les ventes des netbooks, ce segment n’en reste pas moins très instable du fait du positionnement de ces machines : les constructeurs s’acharnent en effet à nous vendre les netbooks comme de petits ordinateurs. Erreur fatale car si cette stratégie a permis de doper les ventes en phagocytant les achats de renouvellement des ordinateurs traditionnels, elle a surtout générée beaucoup de déception auprès de clients qui ont répondu aux sirènes de l’informatique low cost. Résultat des courses : Une tendance qui s’inverse et des ventes qui s’effondrent faute de trouver un second souffle (cf. Is The Netbook Phenomenon Over? In a Way, Yes).

Les netbooks en pleine crise d’adolescence ?

Il faut bien avouer que vendus en tant que petits ordinateurs, les netbooks ont de quoi décevoir : écrans étriqués (impossible d’afficher du 1024*768), processeurs poussifs (des performances bien inférieures aux Dual Core) et systèmes d’exloitation qui sentent le recyclage à plein nez. Vous avez en effet le choix entre Windows XP qui va bientôt fêter ses 8 ans (n’oubliez pas de mettre à jour les bases anti-virus, anti-spyware, anti-malware…) et différentes distributions de Linux qui laissent perplexes (il faut passer par la console texte pour installer de nouveaux programmes).

Les constructeurs ont bien essayé de rattraper le coup en se lançant dans une course à l’armement (fréquence plus élevée du processeur, plus de capacités de stockage…) mais rien n’y fait : Le concept de netbook s’est perdu en chemin et les constructeurs doivent maintenant jongler avec des gammes à la logique sur-réaliste. Pour vous en convaincre, essayez donc de trouver une définition des netbooks qui fasse l’unanimité (je cherche encore).

Nouveaux usages = Nouvelle interface

Pour résumer un long débat je réitère ma définition de départ : les netbooks sont plus de gros smartphones que de petits ordinateurs. Ils ne présentent un réel intérêt qu’équipés d’une connexion permanente et autorisent alors des usages novateurs qui se situent à mi-chemin entre l’informatique traditionnelle, l’internet en situation de mobilité et les médias sociaux. Médias sociaux ? Oui tout à fait, car face à la déferlante des plateformes sociales et à la généralisation des usages “sociaux”, les éditeurs de logiciels commencent à intégrer de façon native différentes fonctions sociales (par exemple dans le futur Firefox), et les éditeurs de systèmes d’exploitation ne seront pas les derniers.

Bref, qui dit nouveaux usages dit nouvelle interface. Le défi des constructeurs de netbook est donc de trouver un système d’exploitation correspondant le mieux à ces nouvelles contraintes :

  • Un tableau de bord plutôt qu’un bureau (façon smartphone) ;
  • Des widgets plutôt que des applications (pour accéder aux fonctionnalités critiques des services en ligne) ;
  • De l’autonomie plutôt que de la puissance (les meilleurs netbooks dépassent les 10 H d’autonomie).

Dans cette recherche de l’interface parfaite, deux acteurs peuvent faire la différence : Moblin et Jolicloud.

Moblin est une initiative lancée en 2007 par Intel (maintenant portée par la Linux Fondation) dont l’objectif est de développer une nouvelle génération de système d’exploitation à destination des netbooks et autres nettops.

La première version de Moblin (à oublier)
La première version de Moblin (à oublier)

Après une première version perfectible, ils viennent juste de sortir une seconde version beaucoup plus convaincante :

La seconde version de Moblin
La seconde version de Moblin

Vous apprécierez sur cette nouvelle interface l’ajout d’éléments caractéristiques du monde de la mobilité (indicateur de charge et de réception en haut à droite, liste des RDV à gauche), l’accès à l’ensemble des outils et fonctionnalités par un système d’onglets (pour éviter le menu “Start“), l’optimisation du format de l’écran (1024*600) ainsi que les raccourcis en page de démarrage  (baptisée m_zone) :

La page de démarrage de Moblin
La page de démarrage de Moblin

Cette interface permet également d’avoir accès à un certain nombre de fonctionnalités sociales comme le People Panel (façon Skype) ou le Status Panel qui n’est pas sans rappeler Twitter :

La liste d'amis dans Moblin
La liste d'amis dans Moblin
La microblogging façon Moblin
La microblogging façon Moblin

Bref, un effort considérable a été fait au niveau de l’interface et de la prise en main, et c’est une très bonne chose (cf. Linux on a Netbook? Intel thinks its all about the User Interface). Bien évidemment la démarche d’Intel n’est pas tout à fait altruiste, ils cherchent avant tout à vérouiller les constructeurs avec leur OS pour ne pas subir la concurrence d’autres fournisseurs de processeurs (cf. Intel v. ARM: The Battle to Run Your Smartphone and Netbook).

Autre acteur de choix sur ce créneau : Jolicloud, la nouvelle start-up de Tariq Krim (fondateur de Netvibes).

Toujours sur un noyau Linux, Jolicloud marche sur les platebandes d’Ubuntu Netbook Remix en proposant une interface spécifique aux netbooks :

L'interface d'Ubuntu Netbook Remix
L'interface d'Ubuntu Netbook Remix
L'interface de Jolicloud
L'interface de Jolicloud

Vous remarquerez que l’interface de Jolicloud est adaptée aux écrans des netbooks (format 104*600 px) et propose un accès simplifié à un ensemble d’applications. C’est à mon sens à ce niveau là que se situe la grande nouveautés des netbooks : ils n’y a plus de distinguo entre applications et services en ligne.

Ils sont encore en phase intensive de développement et les travaux semblent aller dans la bonne direction. Bien évidemment les équipes de Jolicloud ne disposent pas des moyens d’Intel mais ils présentent l’avantage d’être indépendants donc peuvent potentiellement bénéficier du support des industriels.

La dernière version de Jolicloud
La dernière version de Jolicloud

Deux outsiders : Google et Apple

Comme rien n’est simple dans le monde de l’informatique, attendez-vous à voir prochainement débarquer deux poids lourds qui risquent de changer la donne.

Google tout d’abord avec son système d’exploitation mobile Android qui aimerait bien faire d’une pierre deux coups en proposant une version adaptée aux netbooks : Une équipe d’Asus travaille sur un netbook sous Android.

Un netbook sous Android

Une diversification intéressante surtout lorsque l’on prend en compte l’ensemble des services Google liés à la mobilité. Pour poursuivre cette réflexion : Android Isn’t a Phone OS Because in the Future There Will Be No Phones.

Il y a ensuite Apple qui pourrait bien jouer les trouble-fête avec sa propre machine : Apple Netbook Rumors Gain Momentum Once Again.

Un hypothétique netbook de chez Apple
Un hypothétique netbook de chez Apple

D’après les spécialistes, Apple serait ainsi en train de finaliser une sorte de tablet-PC communicante à mi-chemin entre un gros iPhone et un Kindle. De toute façon Apple ne fait jamais rien comme les autres…

Et Microsoft dans tout ça ?

Je ne pouvais pas achever cet article sans parler de Microsoft. Le géant de Redmond détenant près de 96% du marché, vous vous doutez bien qu’ils ne vont pas rester les bras croisés. Ils prévoient ainsi une version netbooks de leur prochain système d’exploitation : Windows 7 Netbook Edition Confirmed.

Impossible de savoir pour le moment si cette nouvelle mouture de Windows va savoir tenir compte des contraintes spécifiques aux netbooks, mais toujours est-il que Microsoft va jouer un rôle central dans l’évolution des netbooks. Espérons que le rouleau compresseur ne va pas tirer le marché vers le bas…