Les tendances du marketing selon les BigBoss

Le mois dernier, j’étais invité à la Winter Edition des BigBoss, un événement centré sur des rencontres professionnelles autour du marketing numérique. L’occasion pour moi de discuter avec un certain nombre d’annonceurs et de prestataires et me faire une idée des tendances en matière de marketing et de vente en ligne. Je vous en propose une analyse à froid : pas de surprise majeure, mais des enseignements intéressants sur ce à quoi vous devez vous préparer pour l’année prochaine.

330 annonceurs et 120 partenaires à 2.300 m d’altitude

Pour celles et ceux qui ne connaissent pas, le principe des évènements BigBoss est assez simple : réunir en un même endroit un maximum d’annonceurs et de prestataires pour stimuler la rencontre entre l’offre et la demande. Initié en 2011 dans le monde du marketing numérique, le concept a progressivement gagné en ampleur pour devenir le “LinkedIn du réel” (dixit Capital.fr). Je ne saurais vous dire si la comparaison est judicieuse (ces deux formes de réseautage répondent à des logiques différentes), mais j’ai pu constater que le principe de rencontres condensées sur 3 jours fonctionne parfaitement bien : BigBoss édition hivernale, une ambiance studieuse.

Pour l’édition d’hiver de ces rencontres, une bonne partie du milieu du marketing numérique était réuni dans la station de Val Thorens pour trois jours d’intenses rencontres et discussions sous la présidence de David Schwarz, Senior VP E-commerce de Carrefour. Président de quoi ? Président d’un jury composé d’annonceurs habitués de ces rencontres (aperçu vidéo ici : BigBoss Winter Edition 2018 11ème Opus).

Ce jury avait pour responsabilité d’évaluer la pertinence des offres des prestataires (les sponsors de l’événement) et de décerner les BigBoss Idol, une série de récompenses attribuées aux plus prolifiques.

Tout ceci est très intéressant, mais en quoi cela vous concerne-t-il ? Je ne me risquerai pas à faire un compte-rendu des échanges et discussions, car j’y étais seul et ne pouvais matériellement pas participer à l’ensemble des échanges. En revanche, je peux vous livrer une analyse des participants pour en déduire les grandes tendances.

Les grandes tendances du marketing

Le marketing est une discipline vaste et en pleine mutation. J’ai d’ailleurs rédigé un certain nombre d’articles cette année sur le marketing agile, le growth marketing, le marketing intégré ou les nouveaux marketeurs. Idem, je me suis intéressé de près au créneau du commerce en ligne, qui est un cousin très proche du e-marketing, avec une rétrospective et une analyse des tendances du e-commerce.

Comme souvent, il n’y a pas de vérité absolue sur un sujet aussi vaste que le marketing, uniquement des points de vue. Pour bien mesurer la complexité du sujet, je vous invite à parcourir la cartographie de Gartner : Digital Marketing Transit Map.

Comme vous pouvez le constater, il y a un nombre ahurissant de pratiques, donc autant de besoins couverts par un nombre tout aussi important de prestataires et fournisseurs de solutions, comme en atteste la Digital Marketing Technology Vendor Map.

Étudier ce schéma en détail est un peu laborieux, aussi je vous propose pour gagner du temps de télécharger la dernière édition du Marketing Report de SalesForce : Introducing the 5th Salesforce State of Marketing Report, Here are the Top Trends Redefining the Profession. Les grandes tendances de la profession sont l’analyse des données pour stimuler la créativité, l’optimisation de l’expérience client, la personnalisation des contenus et offres, l’engagement tout au long de parcours clients unifiés et l’exploitation de l’intelligence artificielle pour doper les performances. Même son de cloche avec les prédictions du portail CMO.com : The 5 Biggest Marketing Trends For 2019.

Comme vous pouvez le constater, le marketing est une discipline qui devient de plus en plus “technique”. Comprenez par là, que la multiplication des canaux / supports et la complexification des parcours publicitaires / d’achat forcent les marques et organisations à s’outiller. Le secteur des marketing technology est donc logiquement en forte croissance, comme nous le confirme cette étude : Martech jumps to 29% of the CMO’s budget in Gartner’s 2018-2019 survey.

Vous pourriez me dire que tout ceci concerne le marché US et que la situation en France est très différente, mais je vous répondrai que non, pas forcément.

Des préoccupations similaires en France

Ceci nous ramène à la Winter Edition des rencontres BigBoss et l’analyse de la liste des sponsors. Cette analyse ne repose pas sur une méthode scientifique, simplement sur une catégorisation des différents sponsors et un classement pondéré en fonction de l’appréciation des annonceurs. Je ne crois pas au hasard : nous sommes dans une période particulièrement tendue, la concurrence est très forte, suffisamment forte pour écarter naturellement les offres hors sujet. S’il y avait 120 sponsors, donc 120 sociétés prêtes à investir une certaine somme, c’est qu’il y a des annonceurs et organisations qui ont des besoins à couvrir.

Avec l’accord du fondateur des BigBoss, Hervé Bloch, je me suis lancé dans une catégorisation plus fine de ces sponsors en fonction de leur typologie, de la finalité de leur offre et de leur principal levier de différenciation. À partir de cette nouvelle catégorisation, j’ai procédé à une pondération en fonction des votes attribués par les annonceurs lors des sessions de business networking.

De cette analyse ressortent les points suivants :

  • 70% des sponsors proposent des solutions, 20% sont des agences ou cabinets conseil et 5% des sociétés de production de contenus. Ceci confirme que nous sommes bien dans une phase d’outillage, le marché n’est pas encore suffisamment mûr pour que les prestataires intègrent leurs propres outils.
  • 26,5% des offres concernent l’acquisition de trafic, 18% la conversion, 11% la relation-client et 9% l’analyse de données. Toucher plus de prospects semble donc être la priorité des annonceurs, largement avant la transformation. Comme quoi, les habitudes ont la vie dure (on cherche avant tout à faire rentrer un maximum de gens dans la boutique).
  • 16% des sponsors proposent des prestations sur l’ensemble des supports numériques, 15% sur de l’intelligence artificielle, 12,5% pour améliorer l’expérience utilisateur et 11,5% pour des actions omnicanal. Si l’IA et l’UX semblaient omniprésentes sur cette édition, c’est le besoin de gérer l’ensemble des supports numériques (web, email, social, mobile…) qui remporte le plus de succès auprès des annonceurs.
  • Les offres liées au référencement et au mobile étaient minorées cette année, car certains prestataires avaient une forme d’exclusivité sur leur créneau. Leur absence du classement est donc à considérer comme une anomalie statistique.
  • Plusieurs thématiques ont fait leur apparition cette année : les solutions de commerce cross-border (pour vendre sur le marché chinois), les offres associées à l’agilité (environnement VUCA oblige), l’analyse des appels téléphoniques (grâce à la reconnaissance vocale) et la délégation d’acquisition de trafic (sur le même principe que la délégation de e-commerce).

Au final, nous retrouvons donc des thèmes très proches de ceux listés dans le rapport de SalesForce ou les prédictions de CMO : parcours client unifié (multi-supports), optimisation de l’expérience client, personnalisation grâce à l’intelligence artificielle, analyse de données… En revanche, je constate l’absence dans le vocabulaire employé par les sponsors de termes comme “Customer Data Platform” ou “attribution”. Ce qui est très étrange, car les CDP sont au coeur du marketing individualisé et des parcours d’achat unifiés, et car un calcul précis de l’attribution est essentiel pour optimiser les dépenses et booster la performance. Il y a donc encore un travail pédagogique à faire pour sensibiliser et éduquer le marché sur ces deux sujets.

Tout ceci me conforte dans l’idée que le marketing est une discipline en pleine évolution / complexification et que les nouvelles pratiques et compétences nécessaires sont toutes liées à la donnée et aux outils pour les exploiter (big data, IA, dataviz…).

J’espère pouvoir participer à la prochaine édition, qui se déroulera en mai 2019, pour pouvoir faire une analyse plus fine et surtout étudier l’évolution des sujets et priorités. Pour tout vous dire, j’ai même le projet d’éditer un baromètre des tendances e-marketing, mais j’aurai l’occasion de vous en reparler.

Merci encore à l’équipe des BigBoss pour leur accueil et la qualité de l’organisation.